[mp_row]
[mp_span col= »12″]
[mp_text]
Musical Avenue : Quel est votre parcours ?
L.-A.V. : Nous nous sommes rencontrés à l’Ecole Centrale Paris. Nous créions des chansons chacun de notre côté. J’ai participé au concours d’éloquence de l’Ecole et j’ai écrit un texte en vers pour la finale. C’est ce qui a tout déclenché. Nous sommes allés au gala de l’Ecole ensemble, et Julien m’a lancé le défi de créer une comédie musicale.
J.S. : C’est ainsi que le spectacle Révolution (ndlr leur premier spectacle créé à l’Ecole Centrale Paris en 2004) est né. La première chanson a été écrite entre le 26 et le 28 mars 2003.
L.-A.V. : Si tu me donnes une baguette magique, je revis la rencontre avec Julien parce que c’est la plus grande chance de ma vie. C’est un cadeau du ciel que de rencontrer sa moitié créatrice. Il n’y a pas un jour où on ne s’engueule pas, mais on le fait en confiance, sans aucune appréhension.
J.S. : Le métier n’est pas facile tous les jours. Parfois, on se sent seul. Quand on est deux, on peut se soutenir mutuellement.
L.-A.V. : Chacun d’entre nous a parfois du mal à « se vendre ». Quand tu te mets dans l’optique de défendre le travail de l’autre, c’est plus confortable que de parler de son propre travail.
Quelles sont vos influences ?
L.-A.V. : En premier, je citerais le duo Menken / Ashman (ndlr compositeur et auteur de La Petite Sirène et La Belle et la Bête pour Disney, entre autres). Howard Ashman est le parolier qui me touche le plus.
J.S. : Je pense qu’il y a aussi du Sondheim. Pas mélodiquement, mais j’adore la façon qu’il a de tout écrire musicalement, en incluant la mise en scène dans la musique. En jouant dans Sweeney Todd, j’ai observé la construction des partitions et sa façon de faire m’a beaucoup inspiré. J’adore aussi Jule Styne (Legally Blond ; Gypsy) et Jerry Herman (Hello Dolly ; La Cage aux folles). Et j’aime beaucoup Boublil et Schönberg, surtout Les Misérables.
L.-A.V. : On a une autre grande influence hors comédie musicale, ce sont les grands films d’aventure des années 1980, comme Retour vers le futur, E.T., Indiana Jones…
Avec qui rêveriez-vous de travailler ?
J.S. : En France, j’adorerais travailler avec Alexis Michalik (Le Porteur d’histoire ; Edmond). Aux Etats-Unis, ce serait Jerry Mitchell (Kinky Boots). On a déjà échangé autour d’un piano d’ailleurs. C’est quelqu’un que j’apprécie beaucoup. Ecrire les chansons d’un film pour Disney fait également partie de nos rêves.
Ludovic, vous avez adapté de nombreux titres prestigieux en français. Quelle comédie musicale étrangère rêveriez-vous d’adapter ?
L.-A.V. : J’adorerais écrire Hamilton en Français. Et aussi Something Rotten car ce serait formidable de transposer toutes les références à Shakespeare. Après, nous avons une idée fixe : si nous avons un rêve en tête, nous essayons de lancer des choses pour qu’il devienne réalité…
Avez-vous des projets pour le cinéma ?
L.-A.V. : Nous n’avons pas de projet avec le cinéma pour le moment. Certaines passerelles existent, comme ce qu’à fait Christophe Baratier en amenant Les Choristes sur scène.
J.S. : A Broadway, les passerelles sont plus évidentes. En France, les deux sont plus séparés…
Prenons une baguette magique : A Foreign Field triomphe dans le West End, et vous croulez sous les propositions à Londres et à Broadway. Est-ce que vous maintiendriez des projets en France ?
J.S. : On a envie de partout. Ça dépend ce qui nous est proposé. Si le projet me touche, bien sûr que je le fais.
L.-A.V. : Si on se projette, c’est forcément un rêve d’avoir nos spectacles à Londres ou à Broadway. Mais même avec la baguette magique, j’ai envie de garder un pied en France parce que c’est mon pays, parce que c’est un genre de spectacles que j’ai envie de défendre en France. C’est un genre que j’aime, un pays que j’aime, j’ai donc envie que les deux se retrouvent. En résumé : je rêve d’aller dans plein de pays, y compris la France ! (rires) Je reste persuadé que c’est un métier de rencontres, comme celles avec David Hutchinson ou les David (ndlr Rozen et Rebouh) de Double D Productions. Quand nous trouvons des personnes qui partagent notre passion pour cette forme d’art, nous avons envie de travailler ensemble indépendamment de la nationalité.
Ludovic a une formation musicale importante. Pourquoi ne pas s’investir davantage dans l’écriture des musiques ? Et vice-versa pour les textes ?
L.-A.V. : Je ne mettrai plus les pieds dans la composition, parce que Julien le fait mieux que moi. Je n’ai plus touché à l’écriture musicale depuis des années. Plus jeune, j’écrivais des chansons. Je n’y suis jamais retourné, parce que je suis profondément touché par la musique que Julien écrit. Parce que sa musique, même si je ne la compose pas, c’est la mienne. Cela dit, je participe pour donner des influences aux orchestrateurs. J’adore trouver les numéros des comédies musicales anglaises ou américaines qui se rapprochent le plus des chansons que nous avons écrites.
J.S. : Sur les textes, je suis plus exigeant avec lui que le contraire. C’est un peu comme si j’étais Timon et lui Pumbaa (ndlr animaux emblématiques du Roi Lion). S’il y a un truc que je ne comprends pas ou qui ne me semble pas fonctionner, je vais insister jusqu’à ce qu’il le change. Il est peut-être un peu moins dur, mais cela lui arrive de me dire qu’il n’est pas sûr d’une chanson. Et souvent, il a raison.
Comment organisez-vous votre travail lorsque vous créez un spectacle ?
L.-A.V. : Nous construisons tellement nos passages musicaux en partant de ce que ça raconte théâtralement, que nous sommes de plus en plus dépendants l’un de l’autre. Nous n’écrivons pas de chanson sans avoir défini le parcours des personnages à l’intérieur. Nous bâtissons toute la structure ensemble.
J.S. : Sur A Foreign Field, il a construit le squelette du scénario. Je me suis mis à chercher des influences, en me plongeant dans la culture de l’époque, mais en conservant une certaine modernité.
L.-A.V. : Il fallait chercher une musicalité pour ce journaliste (ndlr Ben Macintyre, auteur du roman journalistique A Foreign Field). Pour ma part, j’ai lu les poèmes des soldats anglais et français pour chercher de l’imagerie populaire de l’époque. Au même titre, pour Tom Sawyer, j’avais acheté le recueil des critiques qui étaient sorties quand le roman a été publié aux Etats-Unis. Je voulais comprendre la mentalité de l’époque, pour plonger notre spectacle dans le contexte.
J.S. : A partir du synopsis, nous avons déterminé les chansons, et pour chaque chanson, le parcours émotionnel des personnages.
L.-A.V.: Il compose la musique par rapport à tout ce qu’on a défini. C’est la raison pour laquelle je dis que sa musique est la mienne, parce que quand je l’écoute – même si on fait des ajustements – je ressens le moment théâtral.
J.S. : On a vraiment besoin que l’autre aime ce qu’on fait. Quand je présente une musique, je sens tout de suite si ça ne lui parle pas. Quand il m’amène le texte, c’est pire : si je ne le rassure pas….
L.-A.V. : Ce n’est pas une question de rassurer. Julien a cette capacité incroyable de se mettre à la place du spectateur lambda. Il détecte presque instantanément si une phrase est alambiquée ou ne va pas dans la bonne direction. Quand je sais que j’arrive à le toucher, il y a une forte probabilité que j’arrive à toucher les gens. Au départ, j’avais une écriture plus complexe et intellectuelle. La plus grosse difficulté, c’est de continuer à faire simple en restant intelligent. L’anglais me stimule en ce sens, car c’est une langue directe, dans l’action et l’émotion. Je progresse dans l’écriture française en travaillant en anglais. Mes projets d’adaptation des dernières années ont fortement impacté mon écriture en français.
Quels sont vos projets ?
J.S. : On va faire un nouveau projet avec Double D, mais on ne peut pas encore donner le titre. Il devrait être annoncé prochainement. (ndlr Double D a annoncé depuis que ce serait Le Tour du Monde en 80 jours)
L.-A.V. : Nous sommes contents d’embrayer sur un projet avec eux. Ce sont deux producteurs indépendants qui laissent une grande place à des créations d’envergure. Cela fait dix dans que l’on grandit avec eux, ce sont des personnes remarquables, dans le courage et l’ambition.
J.S. : Nous travaillons dans un climat de grande confiance. Ils dégagent une image sérieuse et c’est mérité. Ils n’ont pas brûlé les étapes, ils ont grandi petit à petit et ils ont conscience des risques. En plus de ce projet et de A Foreign Field, notre projet le plus avancé est l’adaptation de Scrooge.
L.-A.V. : Nous avons toujours cinq ou six projets en développement en parallèle, mais il serait prématuré d’en parler… On peut juste dire qu’on a un projet avec Mathieu D’Aurey (Coups de Foudre) sur lequel on travaille depuis huit ans.
L.-A.V. : Quand tu es créateur, tu es obligé d’avoir plein de projets en développement en parallèle. Tu ne sais pas dans quel ordre ils vont sortir, et il faut compter le temps de développement. C’est impossible d’écrire une comédie musicale en trois mois. Les cycles de développement sont parfois longs, et peuvent différer dès lors qu’il s’agit d’une commande ou d’un projet porté par les auteurs. Quand tu as une commande, tu es tiré par les délais.
Comment est né le nouveau projet avec Double D ?
J.S. : Quand on a vu que Tom Sawyer marchait bien, on a pris le temps de réfléchir avec Double D. On a commencé à discuter début octobre, et on a choisi le thème en partageant nos idées. Notre objectif serait de démarrer en février 2020 à Paris. Comme pour Tom Sawyer, on commencerait en tournée.
Avez-vous également des projets séparément ?
J.S. : Nous deux, séparés ? Ça n’existe pas ! (rires)
L.-A.V. : J’ai juste fait Mistinguett sans toi, et les spectacles d’Alain Choquette, le magicien. Je collabore d’ailleurs avec lui à l’écriture de son prochain spectacle.
J.S. : En tant que comédien, je reprends Kid Manoir à l’Olympia. J’ai également la reprise du concert Il était une fois Broadway. J’ai un autre concert à Nice, et un autre au Théâtre des Champs Elysées. Je vais interpréter quelques airs avec un orchestre symphonique, avec Marie Oppert. C’est plus du Sondheim, du My Fair Lady, ce genre de choses.
L.-A.V. : Le 9 décembre je joue Fragotov (ndlr. le méchant de La Petite Fille aux Allumettes). Je ne suis pas monté sur scène depuis six ans, mais aucun des deux comédiens en alternance n’est disponible donc je dépanne pour une date… Et dans un autre registre, Tom Sawyer sera mis à l’honneur dans l’émission 42ème Rue lors d’un enregistrement prévu le 24 novembre.
Retrouvez prochainement la troisième et dernière partie de cet entretien consacrée à leur vision de la comédie musicale sur Musical Avenue.
Entretien réalisé le 17 novembre 2018 par Samuel Sebban
[/mp_text]
[/mp_span]
[/mp_row]