Il y a presque 15 ans, Cameron Mackintosh recrutait les services de l’écrivain Julian Fellowes (« Downtown Abbey ») et des compositeurs et paroliers George Stiles et Anthony Drewe pour ressusciter sur scène le célèbre film de Disney Mary Poppins. Il semble maintenant que cette équipe gagnante ait réussi le même pari avec un autre musical légendaire des années 60, britannique cette fois, basé sur un roman du célèbre H.G. Wells (La Guerre des Mondes).
À l’origine, Half a Sixpence était taillé sur mesure pour Tommy Steele, une rock star de l’époque : le spectacle a connu un vif succès à Londres puis a été transféré à Broadway avant d’ouvrir les portes d’Hollywood à Steele. Ce n’est autre que Joel Grey, le futur MC dans Cabaret, qui a repris le rôle après le départ de Tommy. En 1967, cette œuvre est même devenue un film avec à sa tête un réalisateur américain (George Sidney) . Cette nouvelle version 2017 qui est à l’affiche du Noel Coward Theatre à Londres est produite par Cameron Mackintosh. Elle a d’abord fait les beaux soirs du festival de Chichester où elle a été jouée pendant presque deux mois à guichets fermés… mais est-ce toujours le cas ?
Un musical très plaisant avec beaucoup, beaucoup de danse !
L’ histoire est une sorte de « Cendrillon-homme » qui rencontre My Fair Lady à l’envers, soit une fable sur l’ascension sociale d’un âme « simple ». Le propos se prête naturellement à l’adaptation musicale et l’agréable partition de David Heineken trouve ici une seconde jeunesse grâce à la réorchestration de William David Brohn. Les nouvelles chansons de Stiles et Drewe complètent harmonieusement les chansons originales et se fondent bien dans l’histoire ; certaines d’entre elles, comme le duo à deux filles « A Little Touch of Happiness » et le « showstopper » « Pick Up A Simple Tune » surpassent presque les originales, tout en gardant l’esprit et le style intact. La chorégraphie a couper le souffle d’Andrew Wright est comme d’habitude le point culminant de la soirée avec le numéro « Flash, Bang Wallop », judicieusement déplacé à la fin du deuxième acte . Il est difficile de trouver à l’heure actuelle, même à Broadway, un show avec autant de danse ! Quant à la mise en scène de de Rachel Kavanaugh, elle se distingue par sa fluidité, les décors et les costumes par leur élégance.
Charlie Stemp, une star en devenir !
La distribution est composée de vétérans du West End, comme Ian Bartholomew, tout droit venu de Mrs Henderson Presents, qui joue Chtterlow, tout comme la merveilleuse, mais sous-utilisée ici, Emma Williams dans le rôle de la riche Helen. Devon-Else Johnson campe une touchante Anna, particulièrement dans son solo « Long ago » . Mais la soirée appartient vraiment au nouveau venu, Charlie Stemp, un jeune débutant talentueux, « triple threat » tout droit sorti des ensembles de Wicked assumant le rôle principal sans jamais imiter son prédécesseur Tommy Steele. Sa facilité à chanter en exécutant des pas de danse très physiques est pour le moins spectaculaire et son charme et sa fougue valent à eux seuls le prix de la place. En soi, heureusement que le nom connu prévu à l’origine pour le rôle d’Arthur Kippsse s’est désisté à temps pour que l’on puisse faire cette belle découverte… Un transfert mérité donc mais qui devra lutter pour survivre, malgré d’excellentes critiques, dans un West end où le rétro n’a pas toujours le vent en poupe. Peut-être que l’énorme campagne publicitaire déployée par Cameron Mackintosh suffira à donner le coup de pouce nécessaire…
Crédit photos : Manuel Harlan