Un drame musical dans une Russie tourmentée
Damien Arnoult et Gilles Polop n’en sont pas à leur première tentative. Leur expérience les réunit pour présenter une création originale. L’histoire se tient en Russie, à la fin de la première guerre mondiale, et nous plonge dans le quotidien d’un camp tzigane au bord de la Moskova. Dans un monde en proie au changement, Boris et Anna s’aiment malgré leur différence sociale. Leur amour arrivera-t-il à triompher des obstacles de la vie?
Alors, pourquoi ces choix assez inattendus? Parce que l’auteur est passionné de littérature russe du 19ième siècle, de théâtre, mais également d’opéra avec Carmen de Bizet comme référence. Toutes ces influences font mûrir son projet, et le pousse à réunir 13 artistes sur scène, pour dépeindre l’univers des gens du voyage. C’est ainsi que voit le jour ce drame musical, au sens romantique du terme, puisque la volonté affichée est de mettre en scène toutes les passions. Sur un fond de révolution russe se mêlent amour, jalousie et trahison. Deux mondes aux traditions opposées vont se rencontrer, nouant le drame entre honneur, vengeance et sorcellerie. Mais ces ambitions, aussi nobles soient-elles, ne seraient rien sans une musique à la hauteur des élans de l’âme.
Les classiques français : un écrin pour l’intrigue
Ce spectacle est l’occasion de donner un nouveau souffle à des chansons intemporelles, faisant partie de l’imaginaire collectif. A l’instar de Résiste, Mamma Mia, ou prochainement Je Vais t’Aimer, le livret s’appuie sur les musiques emblématiques du répertoire français.
C’est une difficulté supplémentaire de sélectionner, parmi tous les titres existants, ceux qui s’intégreront aisément au récit. Sont mis en avant des titres variés, interprétés à l’origine par Maurane, Lara Fabian, Barbara ou encore (de façon assez inattendue mais très touchante) Mylène Farmer. Interrogé sur cette sélection, Damien Arnould nous confirme que les musiques retenues se sont imposées d’elles-mêmes, comme une évidence pour l’histoire écrite en amont. C’est le cas de la chanson éponyme Yvan, Boris et moi qui a donné son titre au spectacle. Pour d’autres, c’est l’interprétation lors des répétitions qui a emporté la décision des auteurs. Une création originale se glisse parmi ces titres. Les créateurs relèvent le défi de composer eux-mêmes ce morceau, soignant le texte et les arrangements pour amener de la poésie à un moment précis du spectacle.
Les auteurs remanient aussi certaines chansons pout enlever les parties trop rythmées, dans un souci de cohérence musicale. Un travail de réorchestration est apporté, par l’ajout de violons ou d’instruments à corde, évoquant l’ambiance tzigane.
Un spectacle pour toutes les générations
Derrière l’apparent classicisme des chansons, cette comédie musicale a vocation à s’adresser à tous. Loin des stéréotypes, elle veut emprunter les codes du théâtre moderne pour divertir et toucher le plus grand nombre. Les créateurs insistent sur tous les aspects techniques, soignant le travail des lumières et la mise en scène. Les décors, même peu nombreux, évoquent la grande Russie, l’arbre présent sur la scène est habilement décoré au gré des saisons pour suggérer le passage du temps, le pont enjambant la rivière fait le lien entre le camp bohémien et le monde d’aventures à explorer. Chaque spectateur est invité à faire travailler son imaginaire.
Un soin particulier est apporté aux costumes, que Sonia Silhol veut authentiques. Elle écume les brocantes, vide-grenier et marchés à la recherche de tissus et jupons d’époque. A la manière du théâtre de Tchekhov, l’accent est mis sur les matières naturelles et les couleurs pastels, évoquant une Russie pure. Seul Rebecca, personnage emblématique du clan, se démarque par ses couleurs.
Après un résidence en mars dernier, Yvan, Boris et moi sera présenté au théâtre de l’Ardaillon, entre Agde et Béziers, au mois de janvier 2022. La compagnie est prête pour partir en tournée en France, la logistique ayant été pensée pour.