Depuis le 06 septembre, le Théâtre Ranelagh accueille La Crème de Normandie qui signe le retour de Hervé Devolder à la scène musicale. L’intrigue nous embarque dans une maison close normande à la mode Belle Epoque et autant vous dire qu’il va s’en passer des choses. Nous avons aimé et nous vous expliquons pourquoi.
Bienvenue à la Rose Eclose, lieu de plaisir et de débauche renfermant toutes les petites cachoteries de Philidor Fromentelle, fabricant de bougies le jour et tenancier de maison close la nuit. Tentant de sauver son affaire qui perd pied face à la concurrence coquine des alentours, il transforme son bouge en orphelinat pour appâter un riche mécène venant en aide aux enfants. Venez ajouter une épouse pieuse ignorant les histoires de son mari, des clients assoiffés de folles nuits et des quiproquos toujours plus gros. Le tour est joué, nous sommes conquis.
UN VAUDEvILLE COMME ON LES AIME
Récompensé par deux Molières du Spectacle Musical (Les Fiancés de Loche en 2016 et Chance en 2019), Hervé Devolder s’associe à Milena Marinelli (Kiki de Montparnasse) pour écrire une histoire digne d’un Feydeau. On y retrouve tout ce que nous avions aimé dans les précédents opus. Ici, les personnages sont calibrés à la supercherie et aux accents et jeux de mots aux petits oignons, la surenchère dans l’improbable et bien évidemment, les jolis moments d’émotion qui font toujours du bien à notre petit cœur sensible. Et puis Feydeau aurait pu être auteur de théâtre musical finalement. La trentaine de passages musicaux s’inscrivent positivement dans le récit et gagne en intérêt au fur et à mesure que l’histoire nous captive.
Le temps de la mise en place de la folle manigance, les vingt premières minutes sont un peu redondantes mais vite balayées par l’enchaînement des farces. Le jeu prend son envol à l’arrivée de Madame Fromentelle sur scène et le manège ne cessera de tourner autour d’elle pendant l’heure restante. Elle est accompagnée d’une talentueuse troupe de comédiens-chanteurs, des habitués de l’auteur qui incarnent avec toute leur verve des personnages dessinés pour le rire. Les uns comme les autres sont géniaux.
AH, la Belle Epoque!
Après deux ans d’arrêt, la production Scène et Public a voulu mettre les moyens et proposer un spectacle à la hauteur du faste de l’époque racontée. Jean-Daniel Vulliermoz aux costumes et Jean-Michel Adam aux décors amènent du corps à une scénographie très représentative de la dualité de la société de 1900. Un beau travail de reconstitution a été fait. Les couleurs chatoyantes et les matières soyeuses utilisées rappellent aisément les tableaux de Toulouse Lautrec, grand personnage de son temps. C’est sans compter sur les danses endiablées qui nous rappellent que le french cancan faisait loi.
Derrière tout ce faste, c’est bien de la condition de la femme dont il est question. Dans de somptueux salons et appartements dédiés à la clientèle, le champagne coule à flot. Tandis que dans de sordides dortoirs sous les toits, nos dames de compagnie trouvent refuge (hommage à Zola). Mais pas de sanglot qui tienne, nos héroïnes sont les grandes gagnantes.
Séduction absolue pour cette Crème de Normandie qui nous l’espérons aura le succès qu’il mérite. Cette soirée signait notre retour au théâtre pour la 2022/2023. Les vacances d’été, c’est bien mais la rentrée de septembre dans ces conditions, c’est encore mieux.
Crédits Photo : Scène et Public