Mary Poppins c’est d’abord une série de livres, avant de devenir le film adapté dans les années 1960 par Walt Disney, et une comédie musicale jouée pour la première fois en 2004. Alors que Stage Entertainment cherche toujours ses artistes pour présenter Mary Poppins au théâtre Mogador, les élèves du Cours Florent relèvent le défi pour présenter leur version en TFE.
Note de la rédaction : cet article est présenté comme une retranscription des échanges avec les cheffes de projet, sous forme de questions/réponses ; nous conservons volontairement certaines formulations orales dans les lignes qui suivent.
Musical Avenue (M.A.) : Pouvez-vous nous parler de votre parcours et de votre attrait pour les comédies musicales ?
Pauline Levy-Pardis (P.L-P) : Originaire de Strasbourg, je suis venue à Paris pour suivre les cours du Cours Florent. Bercée par la danse depuis mon plus jeune âge, ce n’était pourtant pas une évidence de se diriger vers le monde artistique avec mes parents issus du milieu scientifique. Ma vocation pour les comédies musicales a pris forme lors d’un stage d’été au Cours Florent. Ce fut une révélation et j’ai sauté dans l’aventure.
Juliette Adjiage (J.A.) : Initialement, le monde des comédies musicales n’était pas du tout dans mes plans. Même en faisant mes premiers pas dans le théâtre et la danse dès mon plus jeune âge, mon amour pour l’école me dirigeait naturellement vers une filière scientifique. Je me suis inscrite pour suivre des études en ostéopathie, mais quelques jours avant la rentrée, j’ai réalisé que cela ne me correspondait pas. J’ai décidé de prendre une année sabbatique et de travailler, cherchant toujours ma voie. C’est à ce moment-là que ma mère a découvert le stage de comédie musicale du Cours Florent, et m’a conseillé de le tenter. J’ai fait le stage d’été, et là, l’évidence m’a frappée : c’était ce que je voulais faire.
En repensant à mon passé, je réalise que ma passion pour les comédies musicales était là depuis toujours, même si je ne le savais pas. Mes films préférés d’enfance étaient majoritairement des films musicaux, mais à l’époque, je n’en avais pas pleinement conscience.
M.A. : Votre affinité pour l'univers Disney a-t-elle influencé le choix de Mary Poppins comme TFE ?
P.L-P. : Absolument. Quand j’étais enfant, Disney était pratiquement mon univers. Mes étagères étaient remplies de DVD Disney, et Mary Poppins était l’un de ces films que j’ai vu un nombre incalculable de fois.
J.A.: Je partage cette passion pour Disney. Ayant grandi à Val d’Europe, une ville baignée dans l’atmosphère magique de l’univers Disney, mes amies avaient des parents qui travaillaient chez Disney. C’est ainsi que Mary Poppins devient un choix naturel pour mon projet de fin d’études. En première année de comédie musicale, je n’avais pas vraiment idée de tous les spectacles qui existaient. J’ai découvert que plusieurs des plus grands classiques Disney étaient adaptés en comédies musicales. Au fur et à mesure que je découvrais les musiques et visuels de la comédie musicale, je me suis dit que ce serait une expérience extraordinaire de monter ce spectacle, de donner vie à une histoire qui a marqué notre enfance, ainsi que celle de nos parents et de nos proches qui pourront venir voir le spectacle.
M.A.: Pauline, tu es à l’origine du projet, comment Juliette t’a-t-elle rejoint pour ce TFE?
J.A : J’ai vu Mary Poppins à plusieurs reprises dans mon enfance, sans pour autant être une passionnée de la première heure de ce film. Par contre Pauline était vraiment passionnée, elle nous en parlait tout le temps pendant nos années de formation au Cours Florent. À la fin de notre deuxième année, nous devons présenter un exercice de « carte blanche ». Nous avons naturellement formé un duo avec Pauline pour notre présentation. Travailler ensemble nous a enthousiasmées, et c’est alors qu’elle m’a convaincue de participer à son TFE et de l’assister.
M.A : Comment abordez-vous la construction du spectacle, en particulier en ce qui concerne la traduction et les chansons ?
J.A.: Pauline m’a remis le livret, et j’ai entrepris la traduction du texte en entier pendant tout l’été 2022. J’ai pris en charge la traduction en raison de mon amour pour les mots. Le décompte des mots, la rythmique des pieds de vers… tout cela m’offre une logique mathématique qui me plaît (et qui me rappelle par certains aspects mon cursus scientifique). L’essentiel est de conserver un sens harmonieux à l’oreille, tout en faisant en sorte que les mots aient une résonance agréable.
Pour les chansons, je me suis appuyée sur les versions déjà adaptées en français pour le film, en particulier sur les chansons emblématiques qui ne peuvent être modifiées. Les chansons les plus célèbres restent inchangées car elles sont profondément ancrées dans la mémoire collective. Quant aux chansons ajoutées spécifiquement pour la comédie musicale, j’ai eu l’occasion de laisser libre cours à ma créativité.
Juliette et Pauline : En l’absence d’entracte pour le TFE, nous avons effectué des coupes significatives dans toutes les chansons. Étant donné que les classiques durent parfois entre 8 et 10 minutes sur scène, nous avons dû les réduire. D’un point de vue vocal, contrairement à la version originale où les ensembles sont bien plus fournis, et comme nous n’aurons pas autant d’artistes sur les planches qu’à Londres ou Broadway, la directrice musicale a sélectionné au maximum 4 voix à harmoniser par chanson.
M.A. : Comment travaillez-vous l'adaptation par rapport aux éléments magiques inhérents à Mary Poppins ?
P.J-P. : Actuellement, nous disposons d’une trame solide pour le spectacle. En ce qui concerne les moments magiques, nous devons bien sûr tenir compte du fait que nous ne disposons pas du tout des mêmes moyens techniques et financiers qu’une grande production. Bien que nous ne puissions pas permettre à Mary Poppins de voler, nous faisons preuve d’inventivité pour créer des astuces visuelles. Laurent, le régisseur de l’école, nous a offert son expertise et ses conseils précieux. Nous avons réalisé plusieurs tests pour déterminer ce qui fonctionne le mieux et éliminer ce qui ne donne pas de bons résultats. La magie est inhérente à Mary Poppins, nous prévoyons de conserver les moments iconiques tout en les ajustant légèrement. Par exemple, pour le moment où elle sort des objets de son sac, nous allons dévoiler un peu les coulisses de cet exploit. Ces moments forts du film et du spectacle sont incontournables, et nous tenons à les intégrer tout en apportant une nouvelle perspective.
M.A. : Comment avez-vous géré le casting pour trouver la personne idéale pour le rôle de Mary Poppins, et les autres ?
J.A. : En ce qui concerne les rôles autres que celui de Mary Poppins, notre choix s’est fait naturellement. Nous avons simplement sollicité nos camarades de promotion, qui sont devenus nos amis, pour participer à cette aventure. Nous avons la chance de travailler avec une équipe talentueuse et soudée, ce qui rendait l’évidence de leur participation.
Et pour Mary elle-même, nous avons eu la chance d’avoir plusieurs personnes intéressées pour le rôle. Nous avons demandé à chaque candidate de nous fournir des extraits audio pour nous aider à prendre une décision. Au fur et à mesure, une évidence s’est imposée : Marie Merceron, une danseuse classique. Son élégance naturelle et son côté très rigoureux se sont se sont clairement démarqués dans son audio et sa façon de s’exprimer. C’était exactement ce dont nous avions besoin pour le rôle.
M.A. : Pouvez-vous nous parler des costumes de Mary Poppins ?
P.L-P. : Ma mère en a été la créatrice principale. Elle a confectionné presque tous les costumes en utilisant des tissus qu’elle a achetés. Dans la version originale, Mary Poppins porte quatre tenues, mais nous en avons gardé deux : la tenue bleue du premier acte et le manteau rouge du deuxième acte (que ma mère a terminé tout récemment). Elle a également réalisé les gilets des ramoneurs et les jupes de Winifred Banks. Nous avons choisi de conserver les tenues emblématiques du film, notamment la robe de Mary et le blazer de Burt (toujours en cours de confection au moment où nous avons réalisé l’interview).
J.A. : Pendant notre résidence, la costumière était présente avec nous pour confectionner les costumes sur mesure pendant que les acteurs répétaient. Elle réalisait des ajustements en direct sur les acteurs. Cette approche nous a permis de voir les costumes prendre forme sous nos yeux.
P. L-P. : Ma mère souhaite vraiment que la magie opère à travers les costumes. Nous avons eu une idée soudaine : ma grand-mère avait conservé des tenues à la cave. Nous avons retrouvé d’anciennes robes alsaciennes dans notre maison de famille, et nous les réutilisons pour certains ensembles. Cela témoigne du fait que ce projet englobe différentes générations. Intégrer des éléments de ma région d’origine dans le spectacle me ravit, pour faire en sorte que les costumes contribuent aussi à la magie.
M.A. : Les accessoires emblématiques de Mary Poppins sont largement reconnus ; à quoi peut-on s’attendre ?
J.A. : Pendant notre résidence, j’ai pris des notes de tout ce que nous devions envisager, comme les décors et les accessoires. Étant donné que de nombreux éléments sont introuvables, nous avons dû créer beaucoup de choses nous-mêmes, comme les bâtons des ramoneurs, ou le visuel des cheminées pour les toits, ou même les cerfs-volants, la malle des enfants.
P.L.P. : J’ai confectionné le parapluie de Mary Poppins moi-même. Il faut qu’il soit immédiatement identifiable et je suis plutôt contente du résultat (NB. : pour l’anecdote, ledit parapluie nous a été présenté en vidéo pendant l’interview, et on vous prédit un effet garanti !). La cagnotte (à laquelle vous pouvez toujours participer ICI) joue un rôle important pour financer tous les objets, mais aussi la résidence. Et au-delà de l’aspect financier, cela témoigne d’un soutien psychologique qui nous encourage à nous dépasser.
Nous avons également pris des décisions créatives, par exemple pour le personnage de Miss Andrews dans le deuxième acte. Nous avons choisi de la matérialiser sous la forme d’une poupée. Mélissa Braizet se charge de la fabriquer en polystyrène sculpté. Même si nous disposons d’un grand nombre d’objets et de costumes, nous voulons stimuler l’imagination du public, en accord avec la philosophie de Mary Poppins : « Tout peut arriver si on y croit ». Actuellement, tout est stocké chez moi, la cave est remplie et il y a un peu de tout un peu partout dans la maison.
M.A : Pour conclure, vous avez effectué une résidence en août, partagée avec le TFE SIX. Pourriez-vous nous parler de cette expérience ?
J.A. : C’était quasiment une obligation, car nous avons quatre actrices qui sont impliquées dans les deux spectacles. Nous avions un lieu mais n’arrivions pas à trouver un créneau où tout le monde pourrait être disponible ; de leur côté les artistes de SIX avaient réservé leur date dans l’agenda mais n’avaient pas de lieu, là aussi c’est devenu une évidence de mettre nos moyens en commun. Ce qui est drôle, c’est que cela s’était déjà produit lors des présentations en plateau qui permettent de sélectionner les TFE à présenter en septembre. Nous avions eu des problèmes de salle et avions déjà partagé les lieux avec SIX, comme quoi il n’y a pas de hasard.
Bien que ce partage ait représenté un défi, nous avons réussi à le relever. Nous avons élaboré un planning permettant à chacun de répéter pour les deux projets.
P. L.P. : Opter pour une double résidence s’est avéré être la meilleure décision que nous aurions pu prendre. Autrement, nous aurions dû travailler sur chaque projet pendant trois jours intensifs, ce qui aurait été trop court et aurait épuisé les artistes. Grâce à cette collaboration, nous avons pu diversifier nos journées, on évite la monotonie et on maintien un équilibre entre les deux projets pour que tous nos camarades s’y retrouvent. On a aussi ressenti un partage des énergies et des expériences ; nous pouvions retrouver des collègues avec qui nous n’avions pas eu l’occasion de collaborer au cours de la journée. Maintenant il nous reste encore du travail pour présenter le TFE le 1ier septembre prochain, mais nous serons prêts.
Retrouvez la cagnotte en ligne ICI
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