En incarnant sur scène le rôle de Stella Spotlight dans la version de Starmania mise en scène par Thomas Jolly, Maag réalise un rêve d’enfant. Elle aspire aujourd’hui à poursuivre l’aventure le plus longtemps possible, tout en fourmillant de projets pour sa carrière solo. Portrait.
« J’ai le sentiment d’être là où j’avais envie d’être depuis toujours », affirme Maag. Elle qui, alors qu’elle était encore enfant, a découvert Starmania grâce à sa grande sœur qui étudiait l’œuvre de Michel Berger et Luc Plamondon au collège, est aujourd’hui emplie de gratitude pour les personnes et les événements qui l’ont amenée jusqu’au rôle de Stella Spotlight… Même si, entre un casting très long et les multiples reports liés à la crise sanitaire, la persévérance a été de mise.
Du music-hall au musical
Une chose est sûre : Maag, de son vrai nom Magali Goblet, a toujours voulu être chanteuse. Son premier souvenir musical ? Lorsqu’elle appelait sa grand-mère depuis son lit pour qu’elles chantent ensemble des chansons… à 4h du matin. Pourtant, avec un père carrossier et une mère enseignante, la musique n’était pas une voie toute tracée. « Je chantais tout le temps, partout », se souvient cette native de Beaune. « Cela allait de la variété française à du Michael Jackson en yaourt. Mon père disait que je faisais « le gugusse ». » Après avoir fait ses premiers pas sur des scènes de music-hall dijonnaises et alsaciennes, elle part suivre une formation de comédienne au cours Florent, puis au sein de Method Acting Center, tout en faisant en parallèle quelques doublages et en écumant les castings de télé-crochets. En 2016, elle participe d’ailleurs à The Voice, où elle interprète « Stop » de Sam Brown lors d’auditions à l’aveugle qui ne porteront pas leurs fruits. Puis viennent les premiers rôles dans des comédies musicales : Bernadette de Lourdes en tant que doublure du rôle de Louise Soubirous, puis Émilie Jolie, où elle incarne quelques temps la sorcière sur la scène de L’Olympia à la suite de Tatiana Matre (Mtatiana). Avant cela, il y avait eu Welcome to Woodstock en 2017, où Luc Plamondon la repère grâce à son interprétation puissante du titre « Kozmic Blues » de Janis Joplin. « Quelques temps après, son assistant m’a appelée pour passer les auditions de la nouvelle version de Starmania. A la base, j’ai préparé le rôle de Sadia et envoyé une vidéo où je chantais « Travesti ». »
Les premières étapes s’avèrent plus compliquées que prévu… jusqu’à ce que l’un des directeurs de casting voie sur YouTube des vidéos de Maag lors de son passage dans l’émission Together tous avec moi, et lui propose de revenir passer les pré-sélections pour le rôle de Stella Spotlight en septembre 2019. « Pour l’anecdote, à ce moment-là, je crois que Thomas Jolly me trouvait trop jeune pour interpréter Stella » rapporte-t-elle, amusée. Mais son talent fait mouche. En 2020, c’est en tant que doublure qu’elle signe son premier contrat… avant que le Covid ne vienne rebattre toutes les cartes. Toute l’équipe est à ce moment-là unanime : Maag sera Stella. « Lorsque Raphaël Hamburger m’a annoncé en mai 2022 que j’étais titulaire du rôle, l’émotion a été très forte, d’autant que je venais de perdre quelques mois auparavant ma maman, qui m’avait toujours soutenue dans mes choix artistiques. J’aurais aimé qu’elle puisse voir ça » confie-t-elle, émue. « Et puis mine de rien, avec les reports, j’avais 3 ans de plus depuis la première audition ! Cela colle assez bien à l’époque qui veut que passés 35 ans, une femme est perçue comme ayant « déjà l’âge de tourner la page »… »
Une Stella entre ombre et lumière
Pour apprivoiser son rôle, Maag s’inspire au départ des interprétations de Diane Dufresne et de Sabrina Lory. « A un moment donné, j’ai arrêté. Comme j’ai une légère tendance au mimétisme, j’ai écouté seulement l’instrumental pour m’approprier le rôle et faire ma propre version. » Le résultat ? Une Stella incarnée, à la puissance vocale toujours aussi impressionnante mais avec un petit supplément d’âme. « J’ai essayé de lui apporter un peu plus d’humanité », glisse l’interprète. « Pour moi Stella, au-delà de son image d’idole sur papier glacé, est quelqu’un de très seul, qui se laisse aveugler par son besoin de gloire et de lumière. J’ai d’ailleurs vu récemment le documentaire « I Am : Céline Dion » (sur Amazon Prime Video, ndlr), et je n’ai pas pu m’empêcher de faire le rapprochement entre ces deux immenses stars pour qui l’amour du public est devenu une drogue. Même si je m’imagine Stella bien plus inaccessible que Céline Dion ! »
En juin 2023, Maag a d’ailleurs décroché le trophée de l’interprète féminine pour ce rôle lors de la 5e édition des Trophées de la Comédie Musicale au Casino de Paris, ex aequo avec Christine Bonnard. « Lorsque j’ai entendu mon nom, j’ai été très émue. Au-delà de la reconnaissance du public, je bénéficiais aussi de celle du métier », commente-t-elle. « Il y a beaucoup de moments où je doute, où j’ai peur de ne plus pouvoir chanter. Ce genre de récompense rassure et fait du bien. »
Une crainte aiguisée par l’endométriose thoracique dont souffre Maag depuis quelques temps. Une maladie rare et peu connue qui s’est manifestée pour la première fois l’an dernier, sur scène, lors d’une représentation de Starmania. « Je ne le savais pas encore, mais je faisais un pneumothorax du poumon droit », raconte-t-elle. « Au moment où je sautillais sur place sur le morceau « Paranoïa », chanté par le personnage du Gourou Marabout, j’ai senti comme quelque chose se déplacer en moi. Je suis sortie de scène en pleurant, mais j’ai tout de même fini le show. » Le lendemain, jour de la dernière parisienne et alors que Diane Dufresne avait annoncé sa venue dans la salle, Maag se réveille avec une douleur au niveau du diaphragme qu’elle prend tout d’abord pour une manifestation du stress. « Je tiens à remercier Jeanne Jerosme, doublure du personnage de Stella, qui m’a soutenue et se tenait prête à me remplacer si besoin », tient-elle à souligner. « Nicolas Dorian, qui est la doublure de Ziggy et aussi coach vocal, m’a également conseillée sur la manière de placer autrement les notes. Finalement, j’ai misé sur l’émotion ce soir-là et c’était peut-être l’une de mes meilleures performances ! » Un diagnostic et plusieurs opérations plus tard, Maag est aujourd’hui sous traitement et vit chaque moment sur scène avec encore plus d’intensité. « C’est un peu comme une épée de Damoclès au-dessus de ma tête : est-ce que le traitement va continuer à marcher ? Est-ce que mon poumon gauche ne va pas lui aussi se décoller ? Personne ne le sait. Et peut-être qu’il n’y aura plus aucune récidive ! Mais dans le doute, je profite de chaque représentation ; ce seront au moins ces spectacles-là que cette saloperie de maladie ne m’aura pas volés ! On verra pour la suite. »
"Je sais pas quoi faire"... ou presque !
La suite, justement, se partagera entre Starmania (actuellement en tournée jusqu’en décembre prochain) et ses projets personnels. En mai dernier est notamment sorti « Je sais pas quoi faire », un titre aux accents disco-funk dont Maag avait commencé à écrire les couplets pendant le confinement. « Lorsque j’ai rencontré mon amoureux, j’ai écrit le refrain », sourit-elle. « Cela raconte l’histoire d’une fille qui ne va pas bien, dans un monde qui ne va pas bien, mais qui vient de rencontrer quelqu’un et lui demande de l’emmener loin de cet univers anxiogène. Finalement, c’est un peu l’histoire de Cristal et Johnny ! » Maag glisse avoir aujourd’hui de quoi faire un album complet. Mais pour l’heure, et dans l’attente d’un label, une deuxième chanson devrait sortir en septembre prochain, là encore aux sonorités disco. Suivra ensuite un EP de 5 titres où les morceaux piano-voix côtoieront ceux faisant la part belle à la basse, son instrument favori.
En parallèle, Maag nourrit un autre rêve : celui de faire un jour du théâtre, et pourquoi pas du cinéma, à l’image de son personnage. Parmi les metteurs en scène avec qui elle souhaiterait pouvoir travailler figure… Thomas Jolly. « Peu importe le rôle qu’il me donnera ! C’est un génie » affirme celle qui, côté comédie musicale, cite également quelques personnages qui l’inspirent : Sally Bowles dans Cabaret, Grizabella dans Cats ou encore Fantine dans Les Misérables, rôle pour lequel elle a d’ailleurs passé les auditions pour la version qui se jouera à partir du 20 novembre 2024 au Théâtre du Châtelet. « J’ai été jusqu’en finale, tout en sachant que je ne lâcherai pas le rôle de Stella tant que Starmania se jouerait », explique Maag. « C’était pour moi plus un défi qu’autre chose. » La chanteuse espère en effet que Starmania continuera encore quelques temps avec, pourquoi pas, un retour à Paris un jour et une tournée mondiale. « Avec le contexte politique actuel, il est plus que jamais essentiel que tout le monde puisse voir cette œuvre », conclut-elle. Espérons donc que les vrais « adieux d’un sex symbol » auront lieu le plus tard possible.
