Critique : »Joker : Folie à Deux » de Todd Phillips

Temps de lecture approx. 5 min.

5 ans après la sortie du premier film, Joaquin Phoenix revient, accompagné de Lady Gaga, dans un nouvel opus, musical cette fois-ci, consacré à l’ennemi juré de Batman. Mais pour quel résultat ?

The joke’s on you

En 2019, les spectateurs découvraient les péripéties du personnage d’Arthur Fleck, incarné à l’écran par Joaquin Phoenix dans un film réalisé par Todd Phillips (bien connu pour la trilogie Very Bad Trip). Le long-métrage avait, à l’époque, su conquérir le cœur du public et de la critique, en remportant de prestigieux prix tels que le Lion d’Or à la Mostra de Venise ou l’Oscar du Meilleur Acteur récompensant la prestation de son comédien principal, et en empochant plus d’un milliard de dollars de recettes sur l’intégralité de son exploitation en salles.

Pas étonnant dans ce cas de figure de voir une suite être rapidement mise en chantier par Warner Bros, afin de capitaliser sur la popularité de ce personnage phare du studio – bien que Joker ait été initialement pensé comme un film autonome. Le projet est alors annoncé en juin 2022 avec le retour de Joaquin Phoenix dans le rôle principal et l’arrivée de la chanteuse et comédienne Lady Gaga au casting. Mais chose plus étonnante, Joker: Folie à Deux est vendu dès son annonce comme… une comédie musicale. Si l’idée est séduisante sur le papier, le résultat est pourtant bien décevant à l’écran…

Le monde est une comédie

Les spectateurs retrouvent donc le personnage d’Arthur Fleck quelques années après le carnage meurtrier qu’il a commis dans le premier opus. Celui qui a mis le feu aux poudres à Gotham City est désormais enfermé à l’asile d’Arkham dans l’attente de son procès qui déterminera sa culpabilité, et semble avoir totalement abandonné sa personnalité machiavélique. Pourtant, sa rencontre avec Harley “Lee” Quinzel, une autre détenue, pourrait bien changer la donne et faire ressurgir ses vieux démons.

Si le scénario aurait pu laisser un semblant d’espoir en ce qui concerne une plongée dans la psyché de son personnage principal et analyser les conséquences de ses actes commis durant Joker, il n’en est rien. Le long-métrage préfère ainsi se complaire dans une fainéantise des plus agaçantes en servant au public, peu ou prou, la même histoire que son prédécesseur tout en ayant aussi peu de subtilité qu’un éléphant dans un magasin de porcelaine quant aux messages qu’il souhaite véhiculer.

C’est bien simple, le film n’a de cesse de hurler à quel point Arthur est un personnage malade que le public ne devrait pas prendre pour exemple (si certaines personnes ne l’avaient pas encore compris), si bien qu’à force, on finit par s’ennuyer ferme devant Joker: Folie à Deux qui n’a absolument rien à raconter si ce n’est d’interminables allers-retours entre l’Asile d’Arkham, où Arthur est enfermé et le tribunal de Gotham où se tient le procès de ce dernier, retransmis en direct à la télévision locale.
Ainsi, aucune réflexion n’est développée tant le film préfère rester en surface et se contente simplement d’effleurer tous les sujets qu’il souhaite aborder, notamment en ce qui concerne la maladie mentale de son protagoniste.

Lady (pas si) Gaga

Si le casting du premier volet demeurait l’une des grandes forces de celui-ci, on ne peut pas en dire autant pour ce deuxième opus.

L’exemple le plus parlant est la présence de Lady Gaga au sein de l’intrigue. La chanteuse, qui a déjà prouvé son talent dans d’autres productions, n’apporte rien à l’ensemble tant son personnage est mal utilisé. Ainsi, sur 2h20 de durée, Gaga n’apparaît que dans 40 minutes au sein de l’intrigue… Ses apparitions étant limitées à quelques lignes de dialogues et certaines chansons, il est bien difficile pour le personnage de Lee Quinzel de pleinement exister et de développer une véritable alchimie avec Joaquin Phoenix. Cette absence de relation torturée entre les deux personnages (censé être le cœur du film) en fait l’un des principaux défauts du long-métrage.

Une belle occasion manquée tant certains choix audacieux dans la construction du personnage d’Harley s’éloignent des itérations du personnage proposées précédemment dans les différents médiums au sein desquels elle est apparue.

Difficile également d’être transcendé par la prestation du personnage incarné par Joaquin Phoenix ; ce dernier se contente de recycler les mimiques utilisées pour le précédent volet sans rien apporter de réellement nouveau. Et que dire de sa prestation vocale qui tient plus du murmure que d’une véritable interprétation? Le comédien déçoit grandement dès qu’on lui demande de pousser la chansonnette et livre une prestation en deçà de celle du premier opus.

“That’s entertainment”

Si l’idée de faire de Joker : Folie à deux une comédie  musicale était alléchante, il faut bien avouer que Todd Phillips se prend rapidement les pieds dans le tapis.

Ainsi, aucune séquence musicale du film n’est véritablement marquante tant leur mise en scène est peu inspirée. Même l’utilisation de plans-séquences ou de quelques mouvements de caméras ne parviennent pas à rendre l’ensemble cohérent et agréable à l’œil, tant et si bien que l’on a l’impression que les situations musicales ne sont là que pour boucher les trous afin que le film dépasse les deux heures de durée. De même, cet aspect musical n’apporte rien de plus à l’ensemble et ne fait que surligner de façon grossière et clichée les émois et tourments des personnages…

À noter, cependant l’utilisation de nombreux morceaux de comédies musicales qui font plaisir à entendre dans un blockbuster de cet acabit et qui pourront donner envie au public de découvrir certains classiques issus de The Band Wagon ou Sweet Charity.

Joker: Folie à Deux est un film paresseux et peu inspiré. Malgré un casting 5 étoiles et une volonté de tenter quelque chose d’original au sein de l’univers très codifié de Batman au cinéma, le long-métrage reste pétri de nombreux défauts qui en font une suite dispensable et une belle occasion manquée.

2/5
Joker : Folie à Deux
Image de Florian Guerard

Florian Guerard

Fan Disney et de cinéma, je grandis en Nouvelle-Calédonie jusqu’à mes 15 ans. C’est à cet âge-là que je découvre le monde de la comédie musicale lors d’un voyage à Londres avec Wicked. Pris de passion pour cet univers, je vadrouille entre Paris, Londres et New York pour en voir le plus possible. Pas étonnant donc de me voir rejoindre Musical Avenue en 2021 pour partager cette p;assion en parallèle de mon activité professionnelle dans le marketing digital
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