Il y a quelques semaines, nous avons été invités à découvrir, au Café de Paris, un concert dédié à deux grands maîtres. Entre Michel Legrand et Andrew Lloyd Weber, les deux heures nous ont paru très courtes tant il a été agréable d’écouter de la musique, tout simplement. Que se cache-t-il derrière ce mystérieux titre Rêves et Ombres ? Ces quelques lignes vont vous mettre sur la voie.
Là où tout a commencé
Nous le savons, le monde du spectacle n’est fait que de changements et d’imprévus. Rêves et Ombres est un concert qui a vu le jour à cause du décalage de calendrier d’un projet plus important qui devait être joué au mois de juin dernier. Dans un format plus construit avec mise en scène, la présence d’un orchestre et des parties chorégraphiées dédiées au film musical Les Demoiselles de Rochefort, le spectacle devait se jouer initialement avec le Chœur Mosaïque, l’ensemble Philavoce et les solistes : Aliénor Schmitlin et Danny Harper (Il était une fois nous deux ; Le Choeur à l’Horizon).
Déçus que le projet ne voit finalement pas le jour, les chanteurs décident de partager le travail initié avec le public, et commencent à organiser une représentation au Café de Paris quand le projet vient finalement à se confirmer au mois de novembre. Assez facilement, la construction de la soirée se fait autour des créations de Michel Legrand ; avec l’aide du Chœur Philavoce, ils étoffent la partition grâce à leur répertoire dédié au Fantôme de l’Opéra. Aussi, le concert auquel nous avons assisté n’est pas forcément voué à vivre sous ce format, ni à se refaire en l’état : l’objectif premier est bien de se préparer et se roder avant le grand saut. Maintenant, quelle connexion pouvons-nous faire entre les deux compositeurs ? A vrai dire pas grand chose, ou simplement se dire qu’ils sont tous les deux fantastiques et qu’ils méritent bien qu’on les associe le temps d’une soirée.
Un concert hommage
Au Café de Paris, l’arrière du bar fait salle comble. Après s’être faufilé pour trouver la meilleure place, le concert démarre. Quoi de mieux que d’ouvrir le tour de chant sur “Paris Violon”, titre évoquant le Paris des musiciens. Danny Harper donne le ton d’une soirée qui sera sous le signe de la beauté, la sincérité et la finesse. Sa voix de baryton embrasse les paroles d’Eddy Marnay sur la composition de Michel Legrand. Nous entendons un léger accent, un joli accent venu de Washington et marqué de ses années de chorale a cappella au lycée. Aliénor Schmitlin prend le relais et nous fait découvrir sa version des “Moulins de mon Cœur, titre principal de L’affaire Thomas Crown. C’est splendide. La soirée peut commencer.
Tout au long du récital, un narrateur va et vient au fil des interprétations et appuie son discours sur une préparation assez drôle pour amener la légèreté bienvenue à la soirée. Il reprend aussi les mots de Michel Legrand posés sur ses œuvres pour introduire les chansons. Quand viendra le tour des Demoiselles de Rochefort, le récit des scènes se dévoile pour amener l’écho parlé aux passages chantés.
Autour des quelques solos, de magnifiques duos sont proposés comme le tout premier de la soirée : “Je ne pourrais jamais vivre sans toi” (Les Parapluies de Cherbourg) rappelle la puissance dramatique des films de Jacques Demy et comment la séparation des amoureux nous émeut toujours autant. Les deux artistes montrent de la complicité dans leur jeu et dans leur voix. Leur technicité est palpable et ne cessera de nous impressionner tout au long de la soirée. Les moments d’ensemble sont aussi appréciables. Soulignons la fluidité avec laquelle ils reprennent les nombreux titres des Demoiselles de Rochefort (la part de « rêves » du concert) connus pour leur rythme très saccadé et difficile à suivre pour le commun des mortels. Le public est attentif et apprécie la partition. Certes, il faut aimer le jazz. Joué de cette façon, nous ne pouvons que l’aimer.
Tout ce beau monde est accompagné par Bastien Nocera au piano qui relève tous les défis de cette soirée. Quand vient le tour de rendre hommage à Andrew Lloyd Webber, on en oublie qu’il est seul sur scène. Le Phantom de l’Opera répond à la part “d’ombres” de la soirée et finit de nous convaincre. Dans une unité saisissante, le chœur et les solistes se dévoilent dans leur puissance.
Vous l’aurez compris, Aliénor Schmitlin, Danny Harper, le Chœur Philavoce et Bastien Nocera ont offert une expérience de grande qualité en reprenant avec rigueur et professionnalisme les airs qui ont fait le succès des œuvres présentées. Malgré la forme minimaliste adoptée, la soirée est réussie et a laissé tout un public conquis. La preuve, les rappels n’en finissaient pas.
Retrouvez les pour leur prochain concert “Les Demoiselles swinguent à Rochefort”, le 09 novembre à Deuil – la – Barre Alors, si vous souhaitez découvrir ou redécouvrir ce qui fait le sel du compositeur oscarisé (tout de même), vous savez quoi faire. Les places sont par ici. Et si vous manquez la date du 09 novembre, rendez-vous au Théâtre Silvia Monfort à Saint Brice sous Forêt, pour leur représentation du 26 novembre.
Crédit Photo : Danny Harper
