Autrefois Soldat Rose, Fabien Ducommun se met aujourd’hui en scène dans une pièce aux allures de voyage intérieur. Ce road trip musical en devient initiatique et nous embarque avec beaucoup de douceur dans l’univers de l’artiste qui livre une prestation touchante et singulière.
Le voyage au service du récit
Fabien Ducommun fait le récit d’une (son?) histoire qui l’entraîne dans une odyssée solitaire à travers les États Unis. Il prend le volant d’une ancienne Chevrolet qu’il nomme affectueusement Princesse et qui sera son guide tout au long du chemin. Ce qui commence comme une série d’événements malheureux, se mue progressivement en un périple transformateur. Au fil des kilomètres parcourus, les fantômes du passé refont surface sous les traits de rencontres qui semblent refléter les épisodes clés de sa vie. Fabien n’a alors pas le choix que de les affronter.
Le “road trip” comme arme à souvenirs est assez classique et a déjà fait l’objet de belles narrations que ce soit au théâtre ou au cinéma. Si l’approche de Fabien Ducommun est distinctive, c’est principalement dans sa capacité à capter des moments de la vie et de les faire vivre pour les spectateurs. Sa narration est rythmée d’anecdotes empreintes de diverses émotions pour créer un rendu à la fois nostalgique et assez universel dans les situations vécues. Le public rentre facilement en empathie avec l’artiste à l’aide d’une scénographie minimaliste, mais étonnement projetée.
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En effet, la signature cinématique – au delà d’être fortement caractérisée par le style musical – se dessine par l’intermédiaire de lumières savamment choisies pour suivre les circonstances, de quelques éléments de décors qui suffisent à transporter le spectateur sur les routes américaines, entre motels défraîchis et stations-service désertes : de toute évidence, le road trip américain par excellence. Ce décor simple, mais évocateur engage donc l’imaginaire du spectateur qui se laisse porter par des titres au parfum d’une Amérique qui fut.
Un univers séduisant
Comme compagnon de route, le répertoire des années 1950 est parfait. La revisite d’un genre musical comme celui des crooners s’inscrit dans la modernité du propos. Atout majeur du spectacle, la dimension musicale ne peut laisser indifférent son auditoire qui reste captif des notes de guitares de son accompagnateur Jean-François Prigent. La musicalité apaisante de l’instrument associé aux aiguës de son chanteur enrobe chaque étape du voyage emplie d’émotions, le duo partageant la même ardeur. Le choix des titres comme “Can’t Help Falling in Love” participe à recréer sur scène l’énergie d’une traversée vers l’Océan Pacifique.
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Que retenir de l’interprétation de Fabien Ducommun ? Elle est juste, travaillée et riche. Chaque mot et chaque geste se montrent pensés et construits au service du récit. Il habite ce petit espace de scène qui se transforme en de vastes horizons grâce à son expressivité. De rares fois, la performance en devient trop intérieure et introspective pour embarquer le spectateur dans le contexte, mais l’ensemble reste très généreux. Toujours la musique comme fil conducteur, il vit ce qu’il chante et sa voix se module au gré des reprises toujours poignantes.
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Aime moi – Road trip musical confirme Fabien Ducommun dans sa capacité à raconter des histoires et rendre un public captif du début à la fin. C’est un seul en scène musical réussi.
L’achat de places se fait par ici.
Crédit Photo : La Scala