Bruxellons! est de retour pour sa 24ème édition avec Elisabeth. Cette année, le festival ne fait donc pas cap sur Broadway ou le West End pour une fois, mais du côté de l’Autriche. Le rendez-vous belge des amoureux de la comédie musicale a mis les petits plats dans les grands pour cette production d’envergure. Qu’en avons-nous pensé ?
Le musical Elisabeth a été créé en 1992 par Michaël Kunze (Le bal des vampires) et Sylvester Levay (Rebecca). L’œuvre retrace la vie de Sissi et comment elle a tenu tête aux institutions qui essayent de la contraindre. Bruxellons! nous propose ainsi cette année la création mondiale en français de la comédie musicale allemande pour son festival sous les étoiles. Une version dans la langue de Molière signée du prolifique Stéphane Laporte (Le Roi Lion ; Frankenstein Junior).
Sissi, la mort et moi
L’intrigue d’Elisabeth est construite autour de trois personnages principaux : à commencer par la souveraine Elisabeth, plus connue par son surnom Sissi, Impératrice d’Autriche. Elle est suivie de près durant toute la pièce par son assassin, Luigi Lucheni. Celui-ci joue le rôle de narrateur, dans le style du Che dans Evita. Pour finir, le musical donne la part belle à la Mort, incarnée sur scène. Le personnage envoûtant essaye d’attirer Sissi pour lui prendre sa vie à plusieurs essais, jusqu’à enfin y parvenir.
A Bruxelles, le trio est incarné avec talent par Marie-Pierre de Brienne (L’apprentissage de Duddy Kravitz ; Mary Poppins), Antonio Macipe (The 25th Annual Putnam County Spelling Bee ; Alice, la comédie musicale) et Nicolas Kaplyn (Combinaison(s) ; Merlin, la légende musicale). Les artistes sont également accompagné.e.s sur scène par des têtes connues du festival Bruxellons!, entre autres : Arnaud Masclet (My Fair Lady) dans le rôle de l’Empereur François-Joseph, Lander Van Nuffelen (Blood Brothers) qui incarne le fils de Sissi. Dans le rôle de l’Archiduchesse Sophie, le public bruxellois retrouve aussi Anne Mie Gils, qui avait interprété Norma Desmond dans Sunset Boulevard en 2018.
Sissi, invitée d’honneur à Bruxelles
Bruxellons! a clairement mis les bouchées doubles pour la mise en scène d’Elisabeth, élaborée par les habitués du festival Jack Cooper et Simon Paco. La production compte sur près d’une trentaine d’artistes sur scènes, une vingtaine de musiciens dans l’orchestre et plus de 150 costumes d’époque. Pour cette édition, le décor est nettement plus simple, mais reste pourtant impressionnant. Une immense sculpture d’aigle, symbole de l’empire, se tient magnifiquement sur la scène. Celle-ci donne le sentiment d’être dans une chute lente, comme pour représenter le destin funeste de Sissi et de sa famille. Effet assuré !
Cette année aussi, le festival met l’accent sur la scénographie avec un chœur remarquable. Un tel niveau élevé de cohésion et d’unité avait encore été rarement atteint dans une production de Bruxellons!. Les comédien.ne.s performent dans des numéros avec des chorégraphies suffisamment élaborées pour être majestueuses, sans être trop complexes pour être bien exécutées. Dès la chanson d’ouverture, le public est happé par la grande qualité de la production.
L’éléphant dans la pièce
On ne peut néanmoins pas éviter le sujet délicat : Elisabeth n’est pas un bon musical. Malgré la plume excellente de Stéphane Laporte. Malgré les décors et les costumes somptueux. Malgré la mise en scène époustouflante et les artistes sur scène d’un haut niveau. En dépit de ce tableau d’honneur, il est difficile de passer outre les faiblesses de l’œuvre d’origine.
Elisabeth a de sérieux soucis dans son livret. Les personnages sont trop peu développés pour que l’on s’y attache vraiment. Son deuxième acte est assez pauvre. Les chansons sont plutôt inégales ou répétitives. Le musical réussit même le triste exploit de nous faire perdre toute compassion pour sa protagoniste. Heureusement, ces défauts ne sont absolument pas du fait de Bruxellons! qui réussit pourtant à sublimer cette comédie musicale bancale.
Le rendez-vous bruxellois de la comédie musicale
Cette année encore, Bruxellons! prouve qu’il figure parmi les incontournables des passionnés de théâtre musical. Une fois de plus, le festival parvient à mettre sur pied une production d’une grande qualité. Le brio de l’adaptation belge finit tout de même par effacer les déséquilibres de l’œuvre d’origine. Le public peut passer un bon moment en très bonne compagnie. Bruxellons! met la barre plus haut cette année. Cela se voit et le pari est réussi ! Rendez-vous donc l’été prochain avec cette fois un monument de Broadway : West Side Story.