La genèse du projet
C’est en travaillant ensemble sur la deuxième mouture de Starmania en 1988 que Michel Berger et Luc Plamondon retrouvent le plaisir de créer en duo. Très vite, le thème de James Dean est choisi et les 2 auteurs se lancent dans l’aventure. Pour se démarquer de leur précédente comédie musicale, Ils axent leur création sur un nombre réduit de protagonistes et une dramaturgie plus poussée.
Je t’aimerai à travers lui
Le spectacle présente le cheminement d’un couple de « teenagers », Renaud Hantson (Starmania 88 ; Notre Dame de et Paris) et Diane Tell (Maryline Montreuil), hantés par la mort de James Dean et auquel ils s’identifient. Ils se retrouvent sur la tombe de leur idole dont la vie s’est arrêtée à 24 ans en pleine gloire. Ils vont être entrainés dans une nuit initiatique par deux personnes. La première est un prêtre joué par Tom Novembre qui se repent d’avoir initié James à la corrida et aux voitures de courses, ses deux passions. La deuxième une diva, incarnation de toutes celles que James Dean a aimées, jouée par Nanette Workman (Starmania 78).
Ensemble, ils revivent le parcours de leur idole dans un ballet tragique, mélange de vie et de mort, d’amour et de haine.
Une réussite artistique totale
La forme opératique du livret ainsi que l’angle narratif adopté par les auteurs font de La légende de Jimmy une œuvre complète. Chaque chanson fait avancer le propos. Chaque scène est une pièce de puzzle. Michel Berger donne une cohérence totale à toutes les compositions.
Berger et Plamondon, après le succès public de Starmania en 1988 obtiennent les moyens de monter leur spectacle dans des conditions confortables. Les représentations ont lieu au théâtre Mogador qui peut contenir à l’époque près de 1800 spectateurs. Ils s’adjoignent les talents de Jérôme Savary (Cabaret ; Marilyn Montreuil) à la mise en scène qui créé le cadre onirique voulu par les créateurs avec une utilisation de tout ce que les technologies de l’époque peuvent apporter à la richesse visuelle (décors multiples en mouvement, projections incessantes, lumières très travaillées).
Les quatre artistes choisis sont parfaits tant par leurs qualité vocale que par leur présence scénique. Ils sont entourés d’une troupe talentueuse de choristes et de comédiens.
Le public présent ne s’y trompe pas et fait une ovation émue chaque soir à ce spectacle. On peut tout de même déplorer une certaine froideur. Celle–ci est due en partie à l’accompagnement musical qui, hormis la présence d’un saxophoniste et d’un guitariste sur scène, n’a pour base que des séquences de synthétiseurs.
Un succès mitigé
Malgré les éloges de la presse, le public n’a pas répondu présent autant que l’auraient espéré les producteurs qui comptaient jouer à guichet fermé pour rentabiliser l’investissement.
Les raisons en sont que tout d’abord, le spectacle a les défauts de ses qualités. Il n’est pas comme Starmania un juke-box de tubes et ainsi déroute un peu les aficionados du duo. Le disque sorti après le début des représentations ne suffit pas à faire se déplacer les foules.
Ensuite le spectacle s’est joué durant la guerre du Golfe. La crainte des attentats a éloigné le public des salles. Il a été un temps question de recréer le spectacle au Casino de Paris après la première série de représentations au théâtre Mogador mais la lourdeur technique et l’incertitude des ventes de billets n’ont pas permis une reprise.
La légende de Jimmy est donc une réussite incomplète. L’œuvre est forte et émouvante avec de vrais moments de bravoure. Malgré cela, elle a peiné à rencontrer le grand public, ce qui n’est pas sans rappeler ce qui s’est passé pour la première version de Starmania qui n’a été jouée sur scène qu’un seul mois et n’est devenu une réussite publique que 10 ans après. Souhaitons qu’une nouvelle équipe s’attelle à rendre à la légende de Jimmy le succès qu’elle aurait mérité.
La légende de Jimmy de Michel Berger (Musique) et Luc Plamondon (Livret)
Avec : Diane Tell, Renaud Hantson, Nanette Workman et Tom Novembre.
Mise en scène : Jérôme Savary ; Décors : Jean Haas ; Projections : Guy Pellaert ; lumière : Jacques Rouveyrollis et Alain Lonchampt ; Costumes : Michel Dussarat ; Chorégraphies : Hervé Lebeau ; Son : Manu Guiot ; Direction musicale Serge Perathoner et Jannick Top