Quand la compagnie « Un Peu Bleu » présente La Route vers l’Oregon, il est préférable d’avoir préparé en amont ses zygomatiques. Construit autour des codes (pas nécessairement les plus louables) de la comédie musicale, ce spectacle nous embarque dans une aventure familiale à mourir de rire. Retour sur une première qui en dit long sur la qualité et le talent de cette jeune troupe fraîchement montée sur scène.
La compagnie Un Peu Bleu nait en mai 2020 dans une temporalité que nous espérons terminée pour de bon. Composée de 8 comédiens/chanteurs/danseurs et 3 créatifs, la troupe a présenté son deuxième projet au Théâtre Clavel autour d’une adaptation de « The Trail to Oregon » de la compagnie américaine Starkid. Inconnue de notre répertoire, on découvre une œuvre drôle, bien ficelée et efficace.
« Une fois que tu es sur la route vers l’Oregon, t’es en pente descendante… »
Comme tout voyage initiatique qui se respecte, l’histoire se construit autour de péripéties bien amenées et assez surprenantes. Pour notre famille de fermiers, la ruée vers l’or ne va pas être si simple. Intégrés à l’histoire dès les premières minutes, nous avons la lourde tâche du choix du nom des personnages, créant inévitablement un décalage tordant pour les scènes à venir. Nous prenons donc la route sans réfléchir, comprenant très vite que Monsieur Humour et Madame Absurde seront nos prochains compagnons de voyage.
Sans aucun doute, une histoire nous est contée. Grâce au travail d’interprétation de l’ensemble des comédiens, personne n’aurait l’idée de remettre en cause la véracité de l’action malgré l’enchaînement de scènes incongrues sur fond de partition variée et bien chantée. Et pour faire monter le baromètre du rire, on rajoute quelques personnages truculents comme des bœufs malades ou un duo de méchants qui a laissé son cerveau aux vestiaires.
Une adaptation prometteuse
Pour le public français que nous sommes, le travail de traduction est excellent et permet de conserver toute l’excentricité de l’œuvre originale. Pas de répit pour les artistes alimentés à 100% par une scénographie et des dialogues denses et énergivores. Le jeu est rodé et si fausse note il y a, le collectif l’emporte. Ici, pas de décors mais simplement une charrette qui n’a rien à envier à celle de Charles Ingalls. Et cela suffit. L’équilibre comédie – chant – danse est respecté et chacun sa spécialité. Dans la longue liste des moments géniaux, nous retiendrons la métamorphose en bœufs de certains des comédiens, jouant drôlement avec leur physique pour l’occasion.
Et pourtant, nous avons pu être lassé quelques fois par l’importante utilisation de l’exagération et l’absurde dans l’histoire. C’est certainement le prix à payer pour asseoir une dynamique comique puissante. Quelques longueurs amorcent une fin qui restera longtemps dans nos mémoires et qui vient conclure avec panache une mise en scène inclusive et le travail impliqué des artistes. Un conseil pour le futur public: laissez votre pragmatisme à la maison et embarquez dans les années 1800 avec votre meilleur second degré.
Des applaudissements continus sont venus clôturer la représentation. Comme beaucoup de jeunes compagnies, Un Peu Bleu nous prouve qu’avec peu de moyens et beaucoup de travail/talent/envie, de belles choses se créent. Et quoi de mieux que le rire comme énergie communicative ! Assurément, une troupe à suivre.
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Crédit Photo : Un Peu Bleu