Les origines…
Nouveau-né dans la production du spectacle vivant, la société de production Jardin sur Cour « a émergé d’une envie commune de s’affranchir du désir des productions existantes ». Quelle bonne idée alors d’adapter Arthur Schnitzler (La Ronde…) !
Schnitzler reste méconnu en France malgré sa grande popularité dans la littérature autrichienne de la première moitié du XXème siècle. Son œuvre conjuguant sentiments et complexité psychologique des personnages le rapproche certainement de la psychanalyse. Anatole en est un bon exemple.
Tom Jones (non pas le chanteur mais bien le parolier et librettiste ) en fait une comédie musicale sous le titre The Game of Love en 1965. Il s’accompagne de la musique de Jacques Offenbach réorchestrée pour l’occasion, avec un supplément musical de Nancy Ford.
La production de Jardin sur Cour adaptée par Stéphane Laporte est accueillie au Le Lucernaire, où cinéma d’art et d’essai, librairie, école de théâtre et galerie d’expositions cohabitent généreusement.
La comédie musicale qui joue un tour au temps
La mise en scène précise et soignée d’Hervé Lewandowski nous accompagne dans la découverte tantôt amusée, tantôt émue des péripéties amoureuses d’Anatole. C’est avec finesse et habilité que ses aventures sont transposées dans 5 époques différentes entre 1910 et 1990, lesquelles constituant autant d’actes. Costumes, accessoires, repères temporels sont convaincants, permettant la lecture de l’histoire dans le temps.
Le décor simple mais ingénieux rythme la pièce, permet des transitions rapides et évite les temps morts tant redoutés. Qui dit transitions rapides, dit changements rapides pour les comédiens, qui assurent ce rythme effréné. Nous les saluons car rien n’y parait.
Rock des années 70, musette de l’entre-deux-guerres, valse mélancolique… Le mélange musical au service des histoires amoureuses d’Anatole est une des forces du spectacle. Le duo vocal de Mélodie/Gaëtan est, à certains moments, d’une telle émotion que le temps s’arrête, nous plongeant dans un état nostalgique immédiat. Bravo à eux !
Une troupe au service de l’œuvre
Nous avons plaisir à retrouver quelques visages familiers : une grande partie de la troupe de La Boule Rouge s’est donnée rendez-vous côté scène et création. Gaétan Borg y incarne brillamment le dandy Anatole à la recherche de sa femme idéale. L’empathie dégagée par le jeu d’acteur le présente tour à tour bourreau et victime. C’est au spectateur de choisir !
Il est accompagné par Max interprété par Yann Sebile à la fois acolyte et conteur de l’histoire brisant à de nombreuses reprises le 4ème mur. La drôlerie de son jeu apporte un bel équilibre et vient souligner les nombreuses maladresses relationnelles d’Anatole.
Ce duo est accompagné par un autre binôme de magiciens portant la voix de plusieurs personnages. Mélodie Molinaro joue avec aisance et malice les nombreuses conquêtes féminines d’Anatole sous les noms de Cora, Annie, Gabrielle, Illona et Annette. Sa capacité à devenir une chanteuse de cabaret, une femme du grand monde ou une actrice volcanique est assez saisissante.
Quant à Guillaume Sorel, il tient le multi-rôle masculin et jongle entre les personnages de Fritz, le camelot, Franz, le Baron Diebel et Flieder. Il est épatant. Spéciale dédicace à Flieder, playboy des années 90 à mourir de rire venant clôturer la ronde des jeux de rôles.
C’est une belle réussite pour Jardin sur Cour qui signe sa première comédie musicale. Le jeu théâtral et les performances vocales sont au rendez-vous : la proposition se démarque par sa qualité et choix de thèmes audacieux.
Pour suivre Anatole dans son parcours amoureux, c’est par ici.
Vous avez jusqu’au 28 novembre. A vous de jouer !