Conte musical créé par la talentueuse Rosy Pollastro, Les Filles de Cendres a fait briller la flamme du public parisien au Regard du Cygne pour une soirée fascinante sous le signe d’une chasse aux sorcières pas comme les autres.
FERMEZ LES YEUX
Asaël est sur le point d’accoucher. Accompagnée par son amie Mélisse, elles trouvent toutes deux refuge au milieu des bois, chez Clarissa, guérisseuse et matrone aguerrie. Oubliant presque qu’elles sont traquées par les inquisiteurs, elles vont trouver une brèche dans leur fuite, pour partager un moment de grâce, d’aveux, où les enjeux personnels répondent au système qui les domine, leur reprochant d’être tout ce qu’elles sont. Mais la réalité les rattrappe…
Les Filles de Cendres est une pièce de théâtre. Un conte musical autour du feu, dans un univers intemporel et poétique, qui nous fait suivre la transformation de la jeune Asaël et ses amies. Ensemble, elles vont affronter leurs peurs et réunir leurs forces pour que son enfant puisse venir au monde et accomplir sa destinée. Conscientes de l’oppression autour d’elles, elles font de ce feu qui consume, le flambeau d’un espoir nouveau.
C’est un huis clos, qui aborde différentes luttes que nous portons dans nos chairs.
C’est un passage, un voile entre les mondes, où la lumière n’est pas sur le chemin que nous imaginions.
C’est dans l’antre du « Regard du Cygne » que nous sommes reçus aujourd’hui pour découvrir cette œuvre. Caché dans une petite maison au fond d’une allée bordée de verdure, nous sommes accueillis à la lueur des bougies et aux fragrances de l’encens pour ce voyage musical de 70 minutes. Sous un toit vouté on retrouve un brasier ardent dont les volutes de fumées évanescentes habillent déjà la pièce. Deux toiles tendues, une armoire mystérieuse, plein de bougies et quelques peaux de vache au sol nous invitent immédiatement dans la maison de Clarissa. La créatrice et autrice Rosy Pollastro (que nous avions adoré dans Norma) nous invite alors à éteindre nos téléphones et à fermer les yeux. Un monologue nous fait petit à petit entrer dans cet univers inquiétant où l’on ressent le sol sous nos pieds nus, où l’air se rafraichit et où le crépitement des braises attise notre oreille. Le ton est donné, bienvenue chez les Filles de Cendres.
un conte flamboyant à trois voix
Ce trio nous invite dans ce huis clos où il faut trouver un moyen de faire accoucher la jeune Asaël (épatante Eva Freitas), poursuivie par les inquisiteurs. Celle-ci est accompagnée de son amie Melisse, la charismatique Diane Rénier qui nous avais déjà convaincu dans Norma par son naturel comique et sa faculté à nous replacer dans l’émotion le moment suivant. Elles sont accueillies dans une maison au cœur des bois par la guérisseuse Clarissa (interprétée avec intensité par Ariane Raynaud, fondatrice de Big Drama, à qui nous devons les incroyables Close et Norma) qui va la protéger pour que son enfant puisse naître dans les meilleures conditions. Sur les mélodies (que l’on aurait aimé un peu plus nombreuses) de Simon Froget-Legendre, elles vont allez au bout de cette nuit jusqu’à ce que les braises s’éteignent avant de se rallumer une ultime fois. Ce conte musical sombre et intense ne s’inscrit pas dans une espace temporel défini car le propos lui aussi ne limite pas à une époque. C’est une réflexion sur la figure de la femme qui a trop longtemps été considérée comme une sorcière. On remarque finalement que les années passent et que cette oppression ne s’est jamais vraiment arrêtée.
Les Filles de Cendres ont allumé les braises d’un conte musical et original célébrant la force des femmes. Le projet ne s’est joué que deux soirs dans la sublime salle du Regard du Cygne mais on espère que le spectacle évoluera et renaitra tel un phénix pour de nouvelles représentations.