“ZZAJ, la burlesque histoire du jazz”, ou comment revisiter en une heure de spectacle l’histoire du jazz de façon totalement décalée. Le duo embarque son public à le rejoindre dans leur folie qui, si elle peut paraître assez clivante, est la définition même de ce courant musical.
Une émission de radio burlesque
Rendez-vous dans le studio d’une émission de radio. Les deux animateurs de “Voyage au pays du Jazz” se préparent pour leur exercice hebdomadaire quand ils réalisent que l’enregistrement est en public. Impossible de stopper l’antenne, l’émission démarre et le show également.
C’est bien simple, tout est prétexte au gag et au n’importe quoi ! Erreurs techniques, oublis, disputes, tout y passe. C’est sans rappeler un certain humour anglais à la Mister Bean qui, s’il peut en exaspérer plus d’un, rassemble dans sa représentation de l’absurde et du comique de situation. Cela ne peut fonctionner uniquement si c’est au service du propos et dans ce spectacle, c’est le cas.

La mise en scène est de ce fait pivot dans la construction de la narration et est prétexte aux sorties de route contrôlées et maîtrisées. Chaque élément de décors est clownesque et détourné de son utilité première sur un rythme crescendo jusqu’à atteindre l’ultime folie et prestation d’envergure des deux artistes (on y reviendra).
Là où la bouffonnerie est l’arme ultime de narration, c’est avec beaucoup de sérieux que la thématique est abordée. C’est avant tout l’expression de passionnés de jazz qui transmettent leur amour d’une musique complexe et qui a beaucoup à dire. De Duke Ellington à Miles Davis, en passant par Ella Fitzgerald et John Coltrane, le répertoire est toujours respecté, voire transcendé. Tout est traité avec beaucoup d’autodérision, sous le prisme des clichés de ces personnes si passionnées, qu’elles frisent la moquerie tant qu’elles en deviennent excessives (chacun pourra se reconnaître). Et puis, comme à l’école, le jeu est source d’apprentissage; les non initiés ressortent experts en free jazz et jazz fusion.
Une performance en duo
Ce serait mentir que de minimiser l’impact de la performance scénique des deux artistes que sont Matthias Lauriot Prévost et Augustin Ledieu. Musiciens et comédiens accomplis, ils maîtrisent l’art de la scène et en font profiter leur public généreusement. L’interaction créée renforce ce lien si important dans cette nature de divertissement pédagogique. Chacun dans son style (on vous laisse découvrir) marque la dynamique de ce spectacle, élevé par un jeu construit et engagé.

Avant d’être un duo de comédiens, le duo est musicien. Pendant toute la représentation, ils jonglent avec une multitude d’instruments, leur permettant d’approcher le large spectre du jazz. Duo “tout terrain”, leur adaptabilité leur permet de passer du scat ou bebop tout en reprenant une musicalité plus classique comme Louis Armstrong. Une nouvelle fois, chaque son ou maladresse sert de subterfuge pour partir vers des contrées plus lointaines mais sans digresser ni s’éloigner du sujet. Quand c’est bien joué, l’auditoire ne peut qu’aimer.
Au-delà de leur dextérité instrumentale, c’est le compérage qui embarque et charme. À la manière de grands duo comiques, le timing irréprochable conduit leurs jeux qui font écho. Nul doute que l’un sans l’autre, cela n’aurait pas eu la même saveur.

En définitive, ZZAJ, la burlesque histoire du jazz s’inscrit dans ces spectacles malins, intelligents et drôlement bien menés. Bien que l’humour puisse être – très – subjectif, on s’accorde sur la créativité et l’ingéniosité de cette création qui fait un bien fou.
Réservations par ici.
Crédit photo : Joris Allardon