Ce soir, le bistro de Jo (Sylvie Audcoeur, co-auteur de la pièce), fille et petite-fille de Russes, ferme définitivement ses portes, laissant la place à un futur parking. Un dernier client (Alexis Desseaux ; Julie Lescaut), amoureux de la patronne, traîne encore un peu, avec le secret espoir de se déclarer enfin.
Entre un carton de déménagement et sa meilleure amie cœur d’artichaut (Marie Piton, deuxième co-auteur ; Les Années Twist), une vodka (voire deux ou trois) et le retour d’une ancienne serveuse (Michèle Simonnet), c’est l’occasion pour Jo d’évoquer ces années passées dans ce bar familial aux accents slaves où il s’en est passé de belles…
Si le scénario est un peu mince et convenu (l’amour secret, la nostalgie, les souvenirs des quatre cent coups de jeunesse…), les dialogues, les costumes et le jeu des comédiens le sont tout autant.
Les intentions sont là, et quoique certainement justes à leur façon, on ne se laisse pas embarquer ; on reste à quai quand les protagonistes se laissent submerger par des émotions qu’on ne parvient pas à partager.
Les personnages demeurent assez caricaturaux dans leurs genres respectifs. Dans cette histoire qu’on n’arrive pas à situer dans le temps, ni vraiment actuelle, ni tout à fait surannée, les femmes crient de manière hystérique quand elles sont heureuses, et malheureuses aussi. L’homme se doit d’être protecteur, un peu macho, à la Brando. Ça sent fort le cliché vu et re-vu.
Mais au fait, c’est un spectacle musical… et en effet, la pièce est rythmée par des chansons, mais pas forcément à bon escient. Les comédiens, avec toute la bonne volonté du monde, ne sont pas pour autant chanteurs, et ont tendance à surjouer les passages musicaux pour faire passer la pilule ; il est délicat de ne pas tomber dans l’excès, voire la minauderie en ce qui concerne Marie Piton.
Les mélodies restent plaisantes, quoique les paroles soient plates et convenues ; la volonté de faire simple pourra excuser un manque d’énergie et d’imagination. Mais ces parties chantées n’apportent malheureusement rien à l’intrigue et souvent lui nuisent directement : elles entrent presque systématiquement en conflit avec l’énergie de l’instant, comme lorsque l’héroïne, au sol, ivre morte, se lève sans peine pour entonner la chansonnette. Une vraie cohérence manque à l’ensemble.
Si les auteures ont voulu se joindre à la vague de succès que connaît le spectacle musical en ce moment, il est vraiment dommage qu’elles soient restées ainsi en surface. Il aurait fallu plus d’énergie, un rythme plus soutenu, en somme des choix de mise en scène clairement plus prononcés pour que le tout ressemble à un projet réellement abouti.
Photo : Éric Devert
Bistro !, de Sylvie Audcœur et Marie Piton
Jusqu’au 31 janvier 2012
Au Théâtre de l’Œuvre
55 rue de Clichy
Paris IXè
Du mardi au samedi à 21h00
Samedi à 18h30
Dimanche à 15h30
Mise en scène : Anne Bourgeois ; musique : Patrice Peyriéras
Avec : Sylvie Audcœur, Marie Piton, Michèle Simonnet, Alexis Desseaux
En alternance au piano et à l’accordéon : Patrice Peyriéras, Sébastien Debard, Benoît Urbain