La nouvelle collaboration de l’Orchestre Pasdeloup avec Christophe Mirambeau au Théâtre du Chatêlet a fait des étincelles ce weekend. Présenté comme une exploration des musiques parisiennes à travers la comédie musicale américaine et anglaise entre 1900 et 1950, le concert "Broadway Lights" a permis au public d’aller de découvertes en redécouvertes grâce à un travail minutieux et d’envergure entrepris par tous les participants. De quoi nous transporter sur la 42ème rue le temps d’un après-midi…
Trois ans après "Music-hall sur Seine" et "Le Plaisir pour le plaisir", l’Orchestre Pasdeloup s’est de nouveau associé à Christophe Mirambeau (Nunsense, Metropolita(i)n) en proposant une redécouverte d’un répertoire méconnu, inédit ou rare, de la comédie musicale anglo-saxonne que Paris a fêtée depuis les années 1900.
Broadway à Paris dans les années 1900 : une richesse musicale inexplorée et méconnue
Que l’on soit néophyte, passionné ou simple curieux de Broadway, chacun semble avoir trouvé son compte samedi après-midi au Théâtre du Châtelet. Transcendé par la présence de l’excellent chef d’orchestre David Charles Abell – qui a d’ailleurs contribué à la conception du concert avec Christophe Mirambeau – l’Orchestre Pasdeloup a délivré une prestation pleine de vivacité et de cœur, conforme à sa réputation.
Plus qu’un concert, "Broadway Lights" était une invitation au rêve, au voyage et à l’histoire grâce à une présentation avisée de Christophe Mirambeau qui a introduit chaque séquence du programme, explicitant le contexte de l’œuvre, le parcours des compositeurs ou l’état d’esprit des personnages au moment du passage musical chanté.
Bien que l’on puisse reprocher certaines maladresses au niveau de l’adaptation française, nous ne pouvons que saluer les efforts et la passion évidente qui a animé Mirambeau pour faire découvrir au public français un répertoire méconnu et pourtant riche. Que l’on apprécie ce répertoire n’était pas tant la question, il s’agissait plutôt d’écouter et de prendre connaissance de tout ce qui a pu faire vivre musicalement la capitale parisienne au cours des années 1900-1950 et constater que le son de Broadway était déjà très présent dans le paysage musical français avant la Guerre.
Du talent, de la passion et de l’humilité pour faire revivre les lumières de Broadway
La présence de Liz Callaway, star de Broadway (Cats ; Miss Saigon ; Baby, musical pour lequel elle a été nominée aux Tony Awards en 1984) et invitée de l’Orchestre Pasdeloup pour son premier concert en France, était un ravissement pour le public qui lui a réservé un accueil très chaleureux, notamment pour son entrée remarquable sur "I Got Rythm" du musical Girl Crazy, composé par Georges Gershwin.
Jérôme Pradon (L’Opéra de Sarah) et Frédérique Varda, bien que peu habitués à chanter ce répertoire des années 1900-1950, ont démontré des qualités vocales et d’interprétation formidables, que ce soit pour en solo ("Toi et Moi" et "Almiro" de Cole Porter pour La Revue des Ambassadeurs) ou en duo ("Frivolette" de Nina Rosa, présenté au Théâtre du Châtelet en 1931). Malgré tout, on regrette que certains passages chantés par Frédérique Varda soient devenus difficilement compréhensibles de part son interprétation lyrique, à opposer au phrasé clair et la diction appuyée de Pradon.
La bonne surprise de ce concert reste néanmoins Loïc Felix. Charismatique, humble et doté d’une voix superbe, son interprétation du tango "Puisqu’aimer c’est mentir" (du Chant du Tzigane) était une véritable merveille. Plus tôt dans l’après-midi, sa performance sur Le Chant du Désert, œuvre de Sigmund Rombert, nous avait déjà beaucoup impressionné.
Le public en redemande : à quand la suite ?
Les amateurs de comédies musicales auront reconnu nombre de comédiens chanteurs habitués des scènes parisiennes au sein du Diva Chorus de Samuel Sené (Fame), dont on n’espère qu’il ne s’agissait pas simplement d’une formation de circonstance, tant la coordination et la richesse de ce Chœur ont marqué les esprits. Leur participation au magnifique final de La Belle de New York de Gustav Kerker puis, sous les applaudissements du public, au rappel d’Annie Get Your Gun nous ont d’ailleurs fait regretter leur temps limité d’apparition durant le concert.
Notons également la très belle création mondiale du compositeur Jean-Philippe Bec, commandée pour l’occasion, du Cygne d’Etang – rhapsodie hommage à Broadway chantée par Frédérique Varda et accompagnée par Catherine Doise au violoncelle ainsi que par l’Orchestre Pasdeloup.
Au-delà d’une sensibilisation au genre, le concert "Broadway Lights" peut se vivre comme une véritable inspiration pour tous les amateurs et passionnés de musicals, en raison de la finesse de l’orchestration et du travail minutieux de restauration des partitions. Ce reflet de l’histoire musicale de Broadway à Paris des années 1900-1950 nous fait espérer une suite, un programme dans la continuité de ce qui nous a été proposé au Théâtre du Châtelet. A quand donc "Broadway Lights" : acte 2 ?