Après le succès du spectacle en mai 2011, le Vingtième Théâtre donnait à nouveau lundi dernier Charlène Duval – Entre Copines devant un parterre conquis d’avance représentatif de la communauté gay de Paris.
Car malgré les apparences et un titre plutôt bas de gamme, le spectacle de Jean-Philippe Maran et Patrick Laviosa (au piano) transcende nettement les bouffonneries vulgaires des cabarets de travestis, type Michou.
One-transvestite-show
Inventée et incarnée par Jean-Philippe Maran, Charlène Duval est une vamp vieillissante qui ne doute de rien : ni de sa séduction, ni de celle de son porte-monnaie, surtout quand elle s’amuse à jouer les cougars ! Ni belle, ni jeune, elle exhibe sans complexe sa longue silhouette gainée de strass sur les scènes parisiennes depuis l’époque où elle faisait les beaux soirs du Piano Zinc, bar-cabaret homosexuel des années 80/90. Et elle tient sacrément le coup !
Mêlant chansons des années 1920 aux années 1980, réparties spirituelles, détails autobiographiques réels et inventés, Charlène Duval déroule une galerie de portraits de femmes.
Le spectacle démarre en fanfare avec l’arrivée de la reine Elizabeth II. Mais, surprise, c’est un Patrick Laviosa méconnaissable (et non Charlène) qui entre en scène attifé en majesté britannique : tailleur gris, bibi façon Queen Mary et sac de rombière. Tandis qu’il s’installe au piano, Charlène, robe glamour rose pailletée de jais, jaillit sur le plateau sous les acclamations de la salle.
Patrick Laviosa pose ses doigts gantés sur le clavier et, en deux coups de cuillère à pot, les deux compères nous troussent une mini opérette sur la première femme de tous les temps. Qui donc ? Ève, bien sur ! "Comme quoi, on n’avait pas besoin de faire tout un foin pour raconter cette histoire !" raille l’interprète. Coup de patte à Adam et Ève, la production boursoufflée de Pascal Obispo qui démarre actuellement au Palais des Sports.
Puis Charlène enchaîne. Elle campe à tour de rôle une pauvre fille paumée (J’ai qu’ça de Mistinguette), une dame pipi (Missis pipi blues de la compositrice Mouron), mais aussi Sara Bernhard ou la Vierge Marie (Réincarnation écrit pour elle en 2008 par Pascal Mary). Suivent trois chansons qu’interprétait Jacqueline Maillan (Les Bleus, Tant qu’il y aura de la pellicule et Acapulco).
Pas des chefs d’œuvres, mais des airs entrainants. "Il faut qu’en sortant il reste quelque chose dans la tête après la fermeture du rideau", insiste Jean-Philippe Maran. "Ce n’est pas évident de trouver un répertoire drôle et bien écrit".
Le clou du spectacle est un duo entre Charlène et Patrick qui exécute des roucoulades désopilantes pour incarner une diva qui chantait faux. Pour le final, Charlène a repris une chanson écrite pour Mireille Mathieu s’intitulant Mireille Antoinette. Elle en a fait Charlène Antoinette, entourée de boys qui dansent merveilleusement bien et lui font un écrin de leurs corps.
En fin de compte, Charlène et Patrick Laviosa forment un excellent duo et leur show est du vrai bon théâtre musical, rempli d’humour. Difficile lorsqu’on incarne un travesti de ne pas sombrer dans la facilité, voire la vulgarité. Mais ils ont réussi. Pour ces raisons Charlène Duval est susceptible de plaire à un vaste public, bien au-delà de la communauté gay .
Si vous n’avez jamais vu Charlène et Patrick Laviosa, ils se produiront en avril, avec Madame Raymonde, dans un cabaret à Nevers. En mai, Charlène sera l’invitée surprise Paris-Madrid, dans le cadre du Festival Diva du Théâtre Musical organisé à Paris à la Nouvelle Mutualité.
Photos : Pierre Alivon
Entre Copines, de Charlène Duval
De et avec Jean-Philippe Maran.
Au piano : Patrick Laviosa.