C’est dans le cadre d’un hommage à René de Obaldia que le théâtre du Ranelagh présente une de ses œuvres, Les Innocentines, tirée d’un recueil de poèmes. Sous-titré "Poèmes pour enfants et quelques adultes", le moins qu’on puisse dire c’est que ce spectacle nous a déroutés.
Un problème de cible…
Il semblait y avoir beaucoup plus d’admirateurs de René de Obaldia que d’enfants dans la salle ce dimanche après-midi. Sur scène, quatre comédiens chanteurs jouent le rôle d’enfants. Si cette convention théâtrale passe plutôt bien pour les garçons, elle est plus délicate chez les filles. Ce n’est pas un problème de jeu (tous les comédiens jouent plutôt bien) mais de chant. En effet, les filles chantent en voix lyrique ou en voix de tête. On a donc du mal à s’imaginer des petites filles durant les passages chantés.
Très peu de décors habillent la scène. Simplement quatre énormes chaises, que les comédiens transformeront en lit par la suite, occupent l’espace. Même si les éléments du décor sont amovibles, ils restent dans l’univers quotidien des enfants.
Il en est de même pour les lieux : une bonne partie du spectacle se déroule dans une salle de classe et l’autre dans la chambre à coucher, pièces qui ne font pas spécialement s’évader les enfants. À la différence d’autres spectacles jeune public qui dépaysent par leur histoire (Aladin, Cendrillon, Peau d’âne…) le soin est laissé au spectateur de faire travailler son imagination.
La forme semble également difficile d’accès : cet enchainement de poèmes, dont certains sont mis en musique, avec ou sans transitions, peut dérouter les plus jeunes spectateurs. Quant aux thèmes abordés, ils nous ont également interrogé : bizutage "hard" pour rentrer dans un groupe, découverte de son corps ("Le zizi perpétuel") ou du corps de l’autre ("Les cuisses de Colette"). L’affiche stipule pourtant la mention "à partir de 7 ans".
Soulignons cependant l’efficacité du dernier tableau "Week-end", frais et énergique.
Un spectacle musical irréprochable
La partie musicale et chantée est parfaite. Les artistes chantent à merveille. On retrouve notamment Manon Landowski (I Do! I Do! ; D’amour et d’Offenbach) et Pierre Jacquemont (un habitué des arts pour la jeunesse, puisqu’il a été cinq ans durant animateur de l’émission Récré A2 sur Antenne 2 de 1978 à 1983). Ce dernier signe également la mise en scène.
La mise en musique de Gérard Calvi est efficace et adaptée. On regrette simplement que les musiciens (un pianiste et un accordéoniste) ne soient pas sur scène mais dans les coulisses, certainement à défaut de place.
Bien que nous soyons passés à coté du spectacle, nous lui reconnaissons des qualités. La profession ne s’y est pas trompée en nommant la mise en scène de Pierre Jacquemont, dans la catégorie "Meilleur spectacle musical" lors de la cérémonie des Molières en 1994 (NDLR : le spectacle a été créé l’année précédente).
Cependant, on est en droit de s’interroger sur le public auquel il s’adresse. De plus, le nombre de productions mettant en scène les héros de contes et légendes enfantins étant nombreuses, on craint que les enfants en âge de choisir ne se tournent pas spontanément vers ce spectacle. C’est donc aux parents de faire la démarche pour voir ce spectacle et y emmener leurs enfants les plus grands, ne serait-ce que pour leur faire découvrir l’auteur.
Les Innocentines de René de Obaldia
Jusqu’au 19 novembre au théâtre Le Ranelagh
5 rue des vignes
75016 Paris
Mercredi et dimanche à 15h, samedi à 16h (relache le 18)
Adaptation et mise en scène : Pierre Jacquemont
Musique : Gérard Calvi
Assistante mise en scène : Garance Coquart
Chorégraphie : Sonia Enquin
Avec : Manon Landowski, Patricia Samuel, Pierre Jacquemont, Philippe Biala
Piano : Véronique Briel, Thierry Boulanger en alternance
Accordéon, guitare et percussions : Stéphane Puc