L’idée d’aller voir Michel Jonasz dans une pièce de théâtre musical nous intriguait autant qu’elle nous inquiétait. Encore un chanteur qui veut jouer à l’acteur ? Va t’il nous faire "La Boite de jazz" ? Et qui est cet Abraham qui donne son titre au spectacle ?
Autant de questions qui nous ont conduit à assister à l’une des représentations qu’il donne au théâtre des Mathurins à Paris, tous les dimanche et lundi, jusqu’à la fin de l’année.
Jonasz seul en scène
Lorsque le rideau s’ouvre, la déception est grande. Aucun instrument ne figure sur scène, qui a pour seul décor un banc. On comprend alors que l’interprète chantera sur bandes play-back orchestre. C’est d’autant plus dommage quand on connaît les talents de jazzman du chanteur. Mais bien vite, on comprend : ce n’est pas Michel Jonasz que l’on vient voir, mais bien Abraham, son grand père juif polonais, obligé de quitter son pays natal pour partir vivre en Hongrie.
Une lourde porte en fer claque, dans le noir. " Ils disent qu’il faut se déshabiller pour la douche… Moi je sais que ce n’est pas pour la douche ". Le cadre est posé. Abraham nous parle depuis un camp de concentration. Il va nous compter ses souvenirs : la rencontre avec Rosele, sa femme, la naissance de ses enfants… Le banc sur scène est celui de la place du village hongrois où Abraham retrouve son meilleur ami, Hankel et devise avec lui sur la vie.
Une performance de comédien
Une chose apparaît comme évidente : Michel Jonasz est un excellent comédien. Certes, il interprète son propre texte, mais sans en rajouter ni forcer le trait. Son grain de voix parlée (plus grave qu’on ne l’imaginait) captive et accroche le spectateur aux souvenirs de son aïeul. Malgré un rythme un peu lent, le texte très pudique sait doser les moments tristes et les instants plus légers. Les discussions avec Hankel, le meilleur ami, font rire le public aux éclats.
On reste plus réservé quant à la musique. Les chansons interprétées remplissent plus la fonction de bande-originale du spectacle qu’elles ne font avancer l’histoire. Michel Jonasz chante sur des musiques d’inspiration hongroise, dont les belles mélodies auraient mérité un vrai violon Yiddish et une guitare tsigane. Un son live aurait sans doute ajouté à l’émotion de la pièce (qui n’en manque pas), mais aurait peut-être nuit à l’intimité que l’interprète entretient avec son public, jusque dans sa voix élégament mise en avant et très juste. C’est un plaisir que de l’écouter.
Ce tendre et délicat hommage à son grand-père illustre avec un réalisme effrayant l’horreur qu’ont vécue les Juifs pendant la seconde guerre mondiale. Nous vous conseillons donc d’aller découvrir Michel Jonasz en comédien de théâtre : c’est une révélation, on vous le dit !
Abraham, un spectacle écrit, mis en scène et interprété par Michel Jonasz
Au théâtre des Mathurins
36 rue des Mathurins
75008 Paris
Les Dimanche à 17h et lundi à 21h, jusqu’au 12 décembre 2011
Réservations dans les points de vente habituels.