Relecture satirique et manichéenne d’une décennie de politique tumultueuse, le nouveau spectacle de Jean-Michel Ribes René l’énervé est présenté au Théâtre du Rond-Point à Paris jusqu’au 29 octobre 2011. Décalé et plaisant, cet opéra-bouffe propose des séquences hilarantes mais laisse une impression mitigée, en raison notamment d’une musique ronflante et d’un deuxième acte qui traîne en longueur.
Le tour de force de René l’énervé consiste à revisiter le parcours et l’ascension de notre Président actuel sans le nommer ni en tombant outrageusement dans l’absurde. La pièce a ainsi le mérite de proposer une réalité visible, sans trop avoir à forcer la caricature pour mettre en exergue le malaise que certains peuvent ressentir vis-à-vis de la gouvernance de notre pays.
Un Conseil des Ministres très farfelu.
Alors, oui, René l’Énervé est un spectacle musical fortement manichéen et décalé, mais c’est justement son irrévérence qui rend le tout plaisant. À cela s’ajoute une distribution de tout premier choix : difficile d’ailleurs d’isoler un ou une interprète du lot, tant leurs qualités vocales et théâtrales sont au diapason. Néanmoins, on regrettera que la confrontation d’artistes lyriques avec certains habitués du théâtre musical français (Sinan Bertrand, Rachel Pignot, Gilles Vajou, Jacques Verzier…) entraîne un décalage au détriment de ces derniers, qui comptent pourtant parmi les meilleurs de la scène parisienne.
Thomas Morris dans le rôle de René l’Énervé, propulsé "Chef du Pays".
En ce qui concerne le texte et la musique, on ne peut s’empêcher d’être agacés par le trop plein d’assonances et d’allitérations ainsi que par les répétitions de phrases auxquelles Jean-Michel Ribes (l’auteur, également directeur du Théâtre du Rond-Point) s’adonne. Hormis quelques numéros au son très "comédies musicales" (on pense aux solos de Jacques Verzier et Gilles Vajou), plus faciles d’accès parce que plus modernes dans leur construction et leurs styles musicaux (swing pour l’un et ballade pour l’autre), les autres séquences musicales ne marquent ni n’enchantent particulièrement.
Côté mise en scène, l’utilisation d’écrans vidéos au cours du spectacle est intéressante quoique parfois abusive et voir des techniciens bouger les décors entre deux chansons a quelque chose d’assez perturbant, même si les transitions assurées par le chœur grec permettent de distraire les spectateurs.
Le chœur grec de René l’Énervé.
Au final, notre appréciation générale de René l’Énervé est aussi plombée par le deuxième acte qui a de quoi ennuyer ferme : trop exhaustif, il est moins léger et surtout propose une fin hésitante qui laisse perplexe. En bref, un spectacle plaisant dans son ensemble mais qui présente des défauts corrigeables pour prendre pleinement la mesure de son potentiel.
À noter pour les intéressés que France 5 diffusera un reportage sur les coulisses de la création de René l’énervé le jeudi 6 octobre à 21h35.
Crédit photos : Giovanni Cittadini Cesi
René l’énervé, de Jean-Michel Ribes
Au Théâtre du Rond-Point, salle Renaud-Barrault
2 bis avenue Franklin D. Roosevelt, Paris 8ème
Du 7 septembre au 29 octobre 2011 à 21h (le dimanche à 15h ; relâche les lundis)
Réservations au théâtre et dans les points de vente habituels
Création et mise en scène : Jean-Michel Ribes ; composition, direction musicale et orchestration : Reinhardt Wagner ; scénographie : Patrick Dutertre ; costumes : Juliette Chanaud ; vidéo : Pierrick Sorin ; lumières : Fabrice Kebour ; chorégraphie : Lionel Hoche ; assistance à la mise en scène : Virginie Ferrere ; son : Samuel Gutman et Guillaume Monard ; perruqes et maquillages : Cécile Larue ; création des têtes de cerfs : Anna Deschamp et Sean Dunbar ; régie : Alain Petit.
Avec : Thomas Morris, Rachel
Pignot, Sinan Bertrand, Jacques Verzier, Gilles Vajou, Sophie Angebault, Gilles Bugeaud, Benjamin Colin, Caroline Arrouas, Camille Blouet, Till Fechner, Claudine Charreyre, Emmanuelle Goizé, Sophie Haudebourg, Antoine Philippot, Fabrice Schillaci, Sébastien Lemoine, Guillaume Severac-Schmitz, Benjamin Wangermée, Jeanne-Marie Lévy, Alejandra Radano