Focus album : « The Wind in the Willows »

Temps de lecture approx. 7 min.

The Wind in the Willows, comédie musicale familiale inspirée du célèbre roman de Kenneth Grahame, propose une adaptation charmante, pleine de vie et fidèle à l’esprit du texte original. L’album de ce spectacle, composé par George Stiles avec des paroles de Anthony Drewe, se distingue par une partition entêtante et une narration captivante !

Créé en 2016 au Theatre Royal Plymouth, le spectacle est basé sur le roman Le Vent dans les saules, publié en 1908 et paru pour la première fois en France en 1935. Ce classique de la littérature britannique pour enfant se déroule dans la campagne anglaise. Il suit les aventures de quatre amis improbables : Mole, un timide et curieux animal qui sort de son terrier pour découvrir le monde ; Ratty, un rat d’eau amoureux de la rivière ; Badger, un mentor sage et protecteur ; et l’excentrique Mr. Toad, un riche propriétaire connu pour son énergie débordante et ses obsessions impulsives.

L’intrigue s’articule autour des folies de Mr. Toad, notamment sa fascination pour les automobiles, qui le conduit à de nombreux accidents et à des ennuis avec la loi. Pendant ce temps, un groupe d’animaux mal intentionnés, les Wild Wooders, dirigés par le rusé chef des belettes, complote pour prendre le contrôle de Toad Hall, la demeure ancestrale de Mr. Toad.

Face à ces défis, les quatre amis unissent leurs forces pour ramener Mr. Toad à la raison, défendre Toad Hall et protéger leur mode de vie paisible…

Une partition variée et accessible

George Stiles nous offre une musique riche et variée, mêlant des styles classiques de la comédie musicale avec des touches contemporaines et parfois même des influences folkloriques. Chaque morceau est soigneusement écrit pour refléter le caractère et l’émotion des personnages ou des situations. C’est le cas par exemple avec l’exubérance des chansons de Mr. Toad comme « The Amazing Mr. Toad » ou lors de moments plus introspectifs avec « A Place to Come Back To », chanté par Ratty.

L’écriture des chansons s’est étalée sur 18 mois dans un cadre particulièrement idyllique : la maison du parolier d’Anthony Drewe en France. Tandis que George Stiles composait au piano dans le salon, Anthony Drewe travaillait sur les paroles depuis la cuisine.

Avec le librettiste Julian Fellowes (Mary Poppins, School of Rock, Half a Sixpence…), l’équipe a exploré de nombreuses références pour créer un univers sonore riche, partageant un nombre incalculable d’idées trouvées sur internet, au point d’explorer presque toutes les ressources disponibles sur YouTube !

Dès le départ, George Stiles savait qu’il était essentiel de créer un paysage musical évocateur. C’est ainsi qu’il a puisé dans 150 ans d’héritage musical britannique, s’inspirant notamment de Gilbert & Sullivan pour la chanson « As If in a Dream » et de Flanders & Swann pour « The Hedgehog’s Nightmare ». Ces influences ont été combinées à des styles plus modernes, comme la pop dans « The Amazing Mr. Toad », le Glam Rock dans « We’re Taking Over the Hall » et un style plus bad-boy dans « The Wild Wooders ».

Ayant grandi en chantant dans des chorales et en jouant de l’orgue à l’école, George Stiles a également intégré une forte dose d’écriture chorale dans les interludes qui rythment les saisons au cours de l’histoire.

Chris Jahnke et David Shrubsole – les orchestrateurs du spectacle – ont encore enrichi cette palette sonore avec des idées célébrant la musique britannique. Ainsi, « The Open Road » évoque des sonorités à la Beatles, le titre « Speed is of the Essence » s’inscrit dans la tradition du music-hall, et « The Greatest Great Escape » rend hommage à l’univers des films de guerre britanniques. La création de cet album a mis en lumière la richesse et la diversité du patrimoine musical britannique.

La partition regorge de mélodies mémorables, avec des refrains accrocheurs qui restent en tête dès la première écoute. Cependant, elle ne tombe jamais dans la simplicité excessive : les orchestrations, riches et détaillées, témoignent d’une véritable sophistication musicale. George Stiles démontre une capacité à équilibrer légèreté et profondeur, une qualité essentielle pour un spectacle familial.

Cette diversité sonore est également rendue possible grâce à la présence d’un orchestre de 14 musiciens comprenant 3 cuivres, 3 bois (jouant une variété d’instruments, notamment des registres graves comme le saxophone baryton et le basson), 2 cordes, 2 guitares (également mandoline, banjo, guitares électriques, ukulélés), une basse, une batterie (avec une large palette de percussions) et 2 claviers.

Des paroles intelligentes et pleines d'esprit

Anthony Drewe nous propose des textes drôles, rythmés et parfois poétiques. Les paroles s’intègrent parfaitement à l’histoire et contribuent au développement des personnages. La chanson « We’re Taking Over the Hall » est un bel exemple d’humour mordant, portée par des jeux de mots ingénieux aux rythmes dynamiques. En revanche, des morceaux comme « The Wild Wooders » révèlent une part plus sombre et mystérieuse, qui contrebalance efficacement les moments légers.

Pour écrire les chansons du spectacle, Anthony Drewe s’est inspiré de la nature environnante :

« Je me suis assis sur les rives de la petite rivière Vers, qui coule dans la vallée près de ma maison en France. J’ai imaginé ce que cela pouvait être de vivre comme un riverain, en regardant l’eau glisser sous un pont, et j’ai essayé de me mettre dans la peau d’un rat, d’une taupe, d’un blaireau et d’un crapaud. Je me souviens avoir imaginé la fierté qu’ils auraient pu ressentir pour leur territoire, leur maison, et j’ai voulu que cela transparaisse dans les paroles. »

Des interprétations convaincantes

Le casting vocal est un autre point fort de cet album studio. Chaque interprète apporte une identité vocale forte à son personnage, rendant l’écoute très immersive même sans les visuels du spectacle. Rufus Hound dans le rôle de Mr. Toad, avec sa voix exubérante et sa diction précise, vole souvent la vedette, mais Simon Lipkin (qui s’est également illustré dans Avenue Q et Rock of Ages), Craig Mather (que l’on retrouve dans Les Misérables : The Staged Concert) et Gary Wilmot (The Prince of Egypt, Wicked) brillent également par leur chaleur et leur jeu d’acteur qui se ressent dans la musique.

Les interprètes secondaires, comme les animaux du Wild Wood entourant le chef des belettes incarné par Neil McDremott (Shrek, Eugenius!, Pretty Woman, Matilda), apportent une énergie brute qui enrichit encore plus l’album.

Si l’album réussit à transmettre l’essence de l’histoire, certaines nuances scénographiques sont nécessairement perdues dans ce format purement auditif. Les moments comiques visuels ou les interactions physiques entre les personnages manquent parfois, et il peut être difficile pour un auditeur non familier avec le livre ou le spectacle de suivre certains détails de l’intrigue. C’est pourquoi nous vous recommandons de visionner la captation très réussie du spectacle, disponible sur BroadwayHD.

L’album The Wind in the Willows est une réussite incontestable, tant sur le plan musical qu’émotionnel. Il capture l’âme de l’histoire tout en y ajoutant une nouvelle dimension grâce à une partition inventive et des performances vocales inspirées. Même si un public non averti peut ne pas saisir pleinement certains aspects de l’histoire, cet enregistrement constitue une porte d’entrée parfaite pour découvrir l’univers du spectacle anglo-saxon.

Un album charmant, idéal pour les amateurs de comédies musicales familiales et pour ceux qui souhaitent retrouver la magie du roman de Kenneth Grahame en musique.

Le Top 3 de Nicolas

  1. Spring : une ouverture très réussie qui nous plonge immédiatement dans l’atmosphère du spectacle
  2. The Amazing Mr. Toad : un numéro extravagant, formidablement interprété par Rudus Hound dans le rôle de Mr. Toad
  3. The Wild Wooders : une ambiance inquiétante et mystérieuse mais avec une mélodie entêtante

Points forts

Points faibles

4/5

Écouter l'album

The Wind in the Willows est accessible sur les plateformes de streaming Deezer, Spotify et Apple Music. Il est également disponible en version physique (1 CD + livret de 28 pages).

Image de Nicolas Schiff

Nicolas Schiff

Musicien depuis l'enfance et aujourd'hui chef d'orchestre, c'est tout naturellement que je suis tombé amoureux des comédies musicales, au travers des partitions que j'ai eu la chance d'interpréter. C'est en alliant cette passion pour la musique et mon métier de webdesigner, que j'ai rejoint l'équipe bienveillante et très sympathique de Musical Avenue ! Fan absolu des spectacles de Schönberg & Boublil, admirateur de Lloyd Webber et accro aux chansons de Menken, je me nourris chaque jour de quelques heures de musique sélectionnées dans la centaine de CD de comédies musicales que je collectionne.
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