Playlist du mois de décembre : "Finishing the Hat"

Temps de lecture approx. 12 min.

Le mois dernier, le monde de la comédie musicale était bouleversé par le décès du grand Stephen Sondheim. Nous avons décidé de lui rendre hommage à travers une playlist de nos chansons préférées de ce maître incontesté du genre.



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Initialement, cette playlist de décembre devait avoir un thème tout autre, mais on ne pouvait passer à côté de cette opportunité de rendre un petit hommage, à notre façon, à Stephen Sondheim. Plus qu’un compositeur et un parolier, cet homme a changé le monde de la comédie musicale et a ouvert la voie à toute une génération d’auteur.rice.s et compositeur.rice.s, les poussant à dépasser les frontières de cette forme artistique en constante évolution. Notre équipe est allée piocher dans son vaste répertoire pour lui dire un dernier au revoir et se plonger dans sa vaste et fructueuse carrière.

Le choix de Chloé : « Something’s Coming », West Side Story

Après le projet avorté de Saturday Night, Stephen Sondheim fait ses débuts professionnels en écrivant les paroles d’une petite comédie musicale pas très connue nommée West Side Story. Il se retrouve donc à travailler avec Leonard Bernstein, Arthur Laurents et Jerome Robbins, des personnalités qui n’ont pas fait grand-chose. Non franchement, ça ne devait pas trop lui mettre la pression. Le résultat de ce quatuor magique est une œuvre intemporelle, véritable chef d’œuvre, n’ayons pas peur des mots, qui fait encore battre bien des cœurs et couler beaucoup de larmes. Dans cet extrait, la première apparition de Tony, Sondheim profite de cette « I want song » classique pour démontrer ses talents de parolier.

Le choix de Philémon : « Little Lamb », Gypsy

Après West Side Story, Stephen Sondheim avait peur de s’enfermer dans son rôle de parolier alors qu’il rêvait de composer ses propres comédies musicales. Son rêve allait devenir réalité avec Gypsy. C’était sans compter sur sa vedette, Ethel Merman. Cette dernière refuse qu’un artiste aussi peu expérimenté compose ce spectacle, lui préférant Jules Styne. Sondheim devra une nouvelle fois se contenter de l’écriture des paroles. Sa frustration a bien failli lui faire quitter le projet. Fort heureusement il est resté. Cette chanson paraît toute simple en apparence, mais cette berceuse à un petit agneau tout mignon décrit si bien la tristesse et la solitude de la jeune Louise.

Le choix de Gaby : « Rose’s Turn », Gypsy

Ethel Merman n’a peut-être pas voulu de lui sur Gypsy, Sondheim lui a tout de même concocté l’« eleven o’clock number » le plus emblématique du répertoire. L’équipe créative avait dû mal à créer un numéro satisfaisant pour clore le spectacle, Jerome Robbins essayait en vain de chorégraphier un ballet-rêve pour Mama Rose, quand Sondheim arrive avec « Rose’s Turn ». Dans son coin, il a fait un assemblage des airs qu’Ethel Merman chantait pendant le spectacle en écrivant par dessus de nouvelles paroles. Un numéro d’anthologie, que toutes comédiennes rêvent d’interpréter, qui scotche encore les spectateur.rice.s à leur siège.

Le choix de Romain : « With So Little To Be Sure Of », Anyone Can Whistle

On ne change pas une équipe qui gagne et Stephen Sondheim fait de nouveau équipe avec le librettiste Arthur Laurents pour une nouvelle comédie musicale. Cette fois-ci, en plus d’écrire les paroles, il est le compositeur, comme il l’était sur A Funny Thing Happened on the Way to the Forum, son précédent spectacle. Malheureusement cette comédie musicale est loin d’être le succès qu’ont été West Side Story et Gypsy. Anyone Can Whistle ne tiendra qu’une seule représentation et est l’un des plus gros échecs que Broadway ait connu. Cette œuvre aura au moins permis à Angela Lansbury de faire ses débuts à Broadway avant de devenir une star avec Mame, et la partition comporte de superbes pages, comme ce duo de séparation bouleversant de simplicité (ici avec Raul Esparza et Sutton Foster pour ne rien gâcher).

Le choix de Thomas : « You Could Drive A Person Crazy », Company

Le début des années 70 marque un tournant dans la carrière de Stephen Sondheim, et sa collaboration avec l’immense metteur en scène Harold Prince n’y est pas étrangère. Ce dernier était déjà producteur sur West Side Story et A Funny Thing Happened on the Way to the Forum, cette fois-ci il prend en main la direction artistique. En à peine quatre ans, les deux hommes vont révolutionner Broadway en créant non pas un, ni deux, mais trois classiques de la comédie musicale. Le premier étant Company, spectacle centré sur la vie d’un célibataire new-yorkais de 35 ans, et ses interactions avec ses ami.e.s et amantes. Une belle occasion pour concocter des numéros musicaux truculents comme ce trio entre ses trois petites amies du moment.

Le choix de Ségolène : « I’m Still Here », Follies

L’année suivante, les deux hommes remettent le couvert avec Follies. Œuvre monumentale mettant en scène les retrouvailles d’anciennes « showgirls » des Weissmann’s Follies avant la démolition de leur théâtre. Cette comédie musicale permet à Sondheim d’écrire de nombreux pastiches de numéros de revues et offre aux comédiennes de plus de quarante ans une large panoplie de rôles (chose encore trop rare à Broadway). Follies comporte quelques-unes des chansons les plus connues de Sondheim. « Losing My Mind », « Broadway Baby » ou encore « I’m Still Here ». Cette dernière chanson, véritable chant du cygne, a été largement reprise, de Carol Burnett à Nicole Croisille en passant par Eartha Kitt et Patti LuPone. Mais nous avons une tendresse toute particulière pour la version d’Elaine Stritch au concert des 80 ans du maître, l’une des dernières apparitions scéniques de la comédienne.

Le choix de Stephany : « The Miller’s Son », A Little Night Music

Dernière œuvre de la folle trilogie Sondheim/Prince du début des années 70, A Little Night Music est sûrement l’une des comédies musicales les plus accessibles du maître. Cette adaptation d’un film d’Ingmar Bergman est un joyeux vaudeville à la campagne où tout le monde veut coucher avec tout le monde (en gros). La partition, proche de l’opérette, nous offre notamment « The Miller’s Son », un grand solo pour le rôle, assez anecdotique disons-le, de Petra. La chanson ne fait en rien avancer l’intrigue, mais le compositeur a souvent déclaré qu’il s’agissait de sa deuxième chanson préférée de toute son œuvre (la première étant « Someone In A Tree » de Pacific Overtures). La voici ici interprétée par la superbe Renée Elise Goldsberry.

Le choix de Margot : « Send in the Clowns », A Little Night Music

Mais comment parler de A Little Night Music sans évoquer « Send in the Clowns » ? Stephen Sondheim a toujours revendiqué sa volonté d’écrire des chansons qui servent à la narration plutôt que de faire des tubes (l’anti Andrew Lloyd Webber quoi) (roh ça va, si on ne peut plus plaisanter), force est de constater qu’il en a écrit un avec cette chanson. Celle-ci ne devait pourtant pas faire partie du spectacle et a été écrite dans l’urgence pendant les répétitions, à la demande d’Harold Prince qui trouvait regrettable que le personnage principal n’ait pas de chanson au deuxième acte. Taillé spécifiquement pour Glynis Johns, qui avait du mal à tenir de longues notes, ce morceau a depuis été interprété par la terre entière. On peut l’entendre ici par Bernadette Peters, considérée comme la muse du compositeur.

Le choix de Nathalie : « Johanna », Sweeney Todd

La collaboration entre Sondheim et Prince ne s’est heureusement pas arrêtée à cette sacro-sainte trinité. Leur collaboration a continué tout au long des années 70 et a également donné naissance à Sweeney Todd. Il s’agit sûrement de l’œuvre la plus connue de Stephen Sondheim en tant que compositeur (le film de Tim Burton n’y est pas pour rien, même si ça fait un peu mal de l’avouer). Cette fable gothique et sanglante est une comédie musicale unique en son genre avec une partition titanesque n’épargnant aucun.e.s chanteur.se.s (petite pensée pour toutes les sopranos qui se sont cassées les dents sur le numéro d’ouverture). Mrs Lovett (rôle écrit pour Angela Lansbury) se taille la part du lion avec ses 14567 solos, mais la mélodie que l’on retient le plus est sûrement « Johanna », la déclaration du jeune premier à l’élue de son cœur, qu’il chante pendant à peu près tout le spectacle. Air qui peut-être un peu agaçant à la longue mais tellement sublime quand il est bien chanté (Messieurs les ténors, on vous aime, mais laissez cette chanson aux barytons).

Le choix de Florian : « Finishing The Hat », Sunday in the Park with George

On parle beaucoup de Harold Prince mais il ne faut pas oublier James Lapine, un autre grand collaborateur de Sondheim. Ensemble ils ont écrit trois comédies musicales dont deux sont devenues cultes (désolé Passion, on t’aime beaucoup quand même). La première n’est autre que Sunday in the Park with George. Au-delà d’imaginer l’histoire autour du tableau Un dimanche après-midi à l’Île de la Grande Jatte de Georges Seurat, cette comédie musicale est un véritable manifeste sur le rôle de l’artiste. Cette chanson illustre parfaitement l’esprit de cette œuvre et est d’ailleurs le titre que Sondheim a choisi de donner au premier volume de son recueil autobiographique (c’est également le titre du dernier épisode de la dernière saison de Desperate Housewives, mais on s’éloigne du sujet).

Le choix de Fabrice : « It Takes Two », Into the Woods

Sondheim retrouve James Lapine (et Bernadette Peters) pour une œuvre tout aussi champêtre mais bien plus délurée, Into the Woods. Un joyeux enchevêtrement de rencontres dans les bois entre différents personnages de contes de fées comme Cendrillon, le petit chaperon rouge ou bien Jack et ses haricots magiques. Pour lier l’histoire, un couple de boulanger a été créé et on suit leur quête dans les bois afin de rompre la malédiction qui pèse sur leur famille. Avant que tout ne dérape (oui, Sondheim n’a jamais été très friand des « ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants »), les deux protagonistes font une pause, garent la vache sur le bas-côté, et chantent ce délicieux duo. Joanna Gleason et Chip Zien reprennent ici leurs rôles plus de vingt ans après la création de ce spectacle.

Le choix de Luc : « Invocations and Instructions to the Audience », The Frogs

Présenté pour la toute première en 1974 à l’Université de Yale (avec un ensemble comprenant entre autres Meryl Streep et Sigourney Weaver), The Frogs aurait pu tomber dans l’oubli, mais c’était sans compter sur Nathan Lane (The Producers). Ce dernier est tombé amoureux de cette œuvre et s’est attelé à modifier le livret avec l’aide de Sondheim. Cette version a fait ses débuts à Broadway en 2004 et est depuis jouée un peu partout (pas autant que Into the Woods certes, mais quand même). Librement adaptée d’Aristophane, cette comédie musicale nous offre un numéro d’ouverture jouissif où deux comédiens nous font un rappel des règles de bonne conduite à appliquer au théâtre. Une chanson éducative très utile que tout le monde devrait écouter avant d’aller voir un spectacle.

Le choix d’Eve-Marie : « Being Alive », Company

Le temps passe mais les œuvres de Sondheim ne vieillissent pas. En 2018, la metteuse en scène Marianne Elliott propose à Londres une toute nouvelle version de Company où Bobby devient Bobbie. Ce changement de genre du personnage principal aurait pu n’être qu’un gadget mais la pièce n’en paraît que plus actuelle. Sondheim lui-même a participé à la réécriture de cette comédie musicale emblématique. Ce spectacle est actuellement à l’affiche du Bernard B. Jacobs Theatre à Broadway. Stephen Sondheim a eu l’opportunité d’assister à une des « previews » de ce spectacle quelques jours avant son décès et en est ressorti très enthousiaste. Une belle révérence pour ce génie absolu de la comédie musicale.

Le choix de la rédaction : « Move On », Sunday in the Park with George

Il y a encore tellement d’œuvres de Sondheim qui n’ont pas été citées dans cette sélection et il a été très dur pour chacun.e d’entre nous de faire un choix parmi le catalogue impressionnant qu’il nous a laissé. Nous allons conclure cette playlist avec une reprise particulière de « Move On » de Sunday in the Park with George, interprétée par le maître lui même lors d’un concert hommage à Michael Bennett, le créateur de A Chorus Line et de Dreamgirls et qui avait également signé les chorégraphies de Company et de Follies. Il n’est certes pas le plus grand des chanteurs, mais l’émotion qui traverse cette prestation est poignante. Bye Stephen…

Et vous, quelle est votre chanson préférée de Stephen Sondheim ?

Image de Romain Lambert

Romain Lambert

Membre de Musical Avenue depuis juin 2012, je suis passionné bien évidemment de comédies musicales mais aussi de ballets. Je passe la majorité de mes soirées entre l'Opéra Garnier, Bastille et le Théâtre du Châtelet. Je voue un véritable culte a Stephen Sondheim et j'essaye de chanter "Glitter and be Gay" sous la douche.
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